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le robinson suisse.

loupe, où nous passâmes une nuit presque aussi tranquille que si nous eussions été à Felsheim.

Le lendemain, de grand matin, nous nous mîmes en route pour le champ de bataille, afin d’examiner le sanglier tué et de tenir un conseil sur l’utilité que nous pourrions en retirer. Nous laissâmes pourtant reposer le pauvre Jack, qui, après son aventure, n’était nullement disposé à se joindre à notre expédition. Dès que nous fûmes près du bois, le chacal et les chiens vinrent au-devant de nous en sautant de joie, et nous reconnûmes avec plaisir qu’il ne leur était arrivé aucun accident pendant la nuit. À la vue du sanglier, je fus surpris de sa grosseur monstrueuse, ainsi que de son excessive laideur. Pendant que je le regardais en silence, Fritz remarqua que nous avions là une excellente occasion de remplacer nos jambons de Westphalie, dont la provision était depuis longtemps épuisée. Je répondis qu’il était à craindre que la chair d’un vieux sanglier, comme celui-ci, ne fût pas fort tendre ni bien facile à digérer, et que, selon moi, il valait mieux commencer par examiner le terrain pour voir si nous ne trouverions pas encore des truffes. Il n’y en avait plus à l’endroit où mon fils avait pris les premières ; mais, l’œil perçant de Fritz n’ayant pas tardé à distinguer des essaims de petites mouches qui voltigeaient de distance en distance, nous fouillâmes le sol, et nous ne fûmes pas longtemps à faire une récolte abondante de ces précieux cryptogames.

Nous nous décidâmes ensuite à n’emporter que la tête et les quatre membres du sanglier. Comme ils étaient fort lourds, nous fîmes cinq claies avec des branches d’arbre ; nous attelâmes à chacune des trois premières un de nos chiens, je traînai la quatrième, et Fritz et Ernest la dernière. Cependant, peu accoutumés à la bride, nos attelages ne suivirent pas, dans leur marche, un ordre bien réglé, d’autant plus que le chacal, auquel nous n’avions point assigné de tâche, allait et venait de l’un à l’autre, dérangeait les chiens, et cherchait, en outre, à s’emparer d’une partie du produit