Page:Johann David Wyss - Le Robinson suisse (1861).djvu/313

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

lants défenseurs, qui se hâtèrent d’en profiter. Mais, quoique blessés, les ours se défendaient avec une vigueur effrayante. La douleur et la colère leur faisaient pousser à chaque instant des hurlements horribles. Le combat, en se prolongeant, pouvait devenir très-dangereux pour nos chiens et pour nous. « Il faut en finir, » criai-je à Fritz, et je m’avançai en tenant mon pistolet à la main. Fritz marchait avec moi. Quand nous ne fûmes qu’à quelques pas, je tirai presque à bout portant, et ma balle cassa la tête au premier ours, tandis que Fritz, passant rapidement derrière le second, lui enfonçait dans le cœur son couteau de chasse.

En les voyant tomber l’un et l’autre, je poussai une exclamation de joie : « Grâce au ciel, nous voilà délivrés d’un grand danger ! Remercions Dieu, mes enfants, de la visible protection qu’il nous a accordée. »

Avant de m’approcher, je m’assurai que les deux ours étaient bien morts, et, pendant ce temps-là, Jack, tout en chantant victoire, se mit à courir après Ernest pour le ramener ; mais le pauvre garçon était encore si effrayé, qu’il eut toutes les peines du monde à se décider à venir nous rejoindre.

Quand il fut près de nous, je lui demandai dans quel but il nous avait ainsi devancés et ce qu’il voulait aller faire dans la grotte. Il me répondit que son intention était de se cacher au fond, et d’imiter alors le grognement de l’ours afin d’effrayer Jack. « Dieu, pour me punir, ajouta-t-il, m’a fait trouver réellement les ours que je pensais à imiter. »

Les enfants n’étaient pas d’accord sur l’usage que l’on pourrait retirer de la dépouille des ours.

« Il faut les écorcher, disait Fritz, pour avoir leurs fourrures.

— Bah ! que veux-tu faire de ces fourrures ? dit Jack : si nous étions au Spitzberg, à la bonne heure, mais ici !

— Mais, reprit Ernest, si elles ne nous servent pas comme vêtements, j’avoue que je les prendrais volontiers pour me