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le robinson suisse.

Après ce coup d’œil jeté sur ce vaste horizon, nous nous mimes en marche en nous éloignant de la rivière. À mesure que nous avancions le terrain semblait plus aride ; la verdure était remplacée par un sol poudreux et sec, où apparaissaient seulement quelques touffes isolées de géraniums et quelques cactus. Le sol, gercé par la chaleur, présentait de nombreuses fissures, et les rayons du soleil, reflétés par la terre, rendaient notre marche plus pénible. Heureusement nous avions eu soin de remplir nos gourdes à la rivière, et elles nous étaient d’un grand service. Je fus surpris qu’une demi-heure eût suffi pour que le paysage se transformât si complétement. Jack me demanda alors si nous n’étions pas venus jusque-là déjà et comment il pouvait se faire que la nature fût aussi changée.

« D’abord, lui répondis-je, nous nous sommes avancés aujourd’hui à plus de deux milles au delà de l’espace que nous avons parcouru autrefois. Quand nous avons fait ensemble notre excursion, nous, n’avons pas quitté les bords de la rivière. Du reste, cette terre n’est pas moins fertile que celles qui sont sur l’autre rive, mais le manque d’eau empêche la fécondation. À l’époque des pluies, elle se couvre momentanément d’une riche végétation qui dure quelques jours peut-être encore, mais que la sécheresse ne torde pas à faire disparaître. »

Il nous fallut deux heures pour atteindre le pied de la petite colline. Quand nous y arrivâmes, accablés par la chaleur et la marche, nous nous étendîmes à l’ombre du rocher et nous restâmes près d’une heure occupés à considérer le paysage, tout en suçant, pour nous rafraîchir, quelques morceaux de cannes à sucre dont nous nous étions chargés. Nous avions un vaste horizon devant nous. Une chaîne de petites montagnes le bordait à une distance que je supposai être de quarante à cinquante milles. Leurs sommets étaient couronnés de vapeurs bleues et, bien que l’éloignement ne nous permît pas de distinguer leur nature,