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le robinson suisse.

elle dans la cuve du petit François, et en prit quelques poignées d’avoine, de pois et d’autres graines, que notre volaille mangea avec avidité. Je lui fis remarquer que ces graines pourraient nous être plus tard, à nous-mêmes, d’une grande utilité ; elle les remplaça, comme nourriture de nos poules, par des morceaux de biscuit.

Nos pigeons se perchèrent dans le creux des rochers ; les poules prirent pour juchoir le bâton de notre tente, et les oies et les canards se cachèrent dans les joncs du ruisseau ; tout annonçait l’heure du sommeil. Je rappelai mon petit monde ; je chargeai nos armes, et, après avoir fait notre prière du soir, nous nous retirâmes dans notre tente.

La nuit vint tout à coup sans crépuscule, au grand étonnement de mes enfants. « Ces ténèbres subites me font croire, leur dis-je, que le lieu où nous nous trouvons est voisin de l’équateur, ou, du moins, qu’il est situé entre les deux tropiques : le crépuscule est produit par les rayons du soleil brisés dans l’atmosphère ; or, plus ces rayons frappent la terre obliquement, plus leur lueur affaiblie éclaire d’espace ; au contraire, si ces rayons se rapprochent de la perpendiculaire, moins l’espace embrassé par eux est étendu, plus vite, par conséquent, la nuit succède au jour.

Après avoir examiné encore une fois les alentours de ma tente, j’en fermai l’entrée. À minuit le coq chanta et je m’endormis. Je m’aperçus qu’autant le jour avait été chaud, autant la nuit fut froide. Il nous fallut même nous serrer comme de vrais moutons pour nous réchauffer mutuellement ; néanmoins, grâce à notre extrême fatigue, nous goûtâmes quelques heures d’un bon sommeil.