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le robinson suisse.

car le boa sembla plongé dans une torpeur complète, sans aucun mouvement qui révélât son existence.

L’opération avait duré cinq heures, depuis sept heures du matin jusqu’à midi ; j’en avais suivi toutes les phases avec anxiété ; le moment favorable pour l’attaque me sembla arrivé enfin. Je m’élançai le premier en criant aux armes. Fritz était à mes côtés, Jack nous suivait, mais à quelques pas derrière, et, certes, sa frayeur me paraissait bien naturelle.

Quant à Ernest, il montra plus de prudence encore, il ne quitta pas l’abri du rocher. François et ma femme étaient toujours dans l’intérieur de la grotte.

À mesure que j’approchais, je reconnus la vérité de mes conjectures : c’était bien là le véritable boa, le roi des serpents, le plus terrible et le plus dangereux, au dire de tous les naturalistes. Il restait immobile devant moi, et sans ses deux yeux, qui brillaient ardents et enflammés, on eût pu le croire mort.

Quand je fus à une vingtaine, de pas, je lui lâchai mon coup de fusil dans la tête ; Fritz imita mon exemple, et les deux balles portèrent en plein sur le crâne de l’animal. Le corps resta immobile, mais la queue s’agita avec une sorte de rapidité convulsive ; je m’avançai plus près encore, toujours accompagné de mon fils aîné, et nous déchargeâmes presque à bout portant nos pistolets sur la tête du monstre, qui ne donna plus signe de vie. Jack nous avait rejoints ; il voulut prendre part à notre triomphe, et vint à son tour, faire feu sur le ventre de l’animal. Mais, à cette dernière décharge, le reptile sembla éprouver une nouvelle sensation, sa queue s’agita et vint heurter le petit imprudent, qui fut renversé à terre. Jack se releva avec rapidité et je me mis en défense immédiatement, mais le boa resta sans mouvement.

Tous, alors, nous poussâmes des cris de victoire qui ramenèrent immédiatement auprès de nous Ernest, François