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le robinson suisse.

nos champs afin d’obtenir que mes fruits fussent mûrs en même temps, ce qui permettrait d’en faire la récolte en une ou deux semaines. J’ajournai l’exécution de ce projet aux derniers jours qui précéderaient la saison des pluies, pour que l’eau fertilisât tout de suite la semence ; et, en attendant, je me livrai, à l’intérieur, à des travaux de buffleterie assez longs et assez difficiles. Je confectionnai des harnais complets pour les buffles et l’onagre. Les peaux de kanguroos et de chiens de mer, le crin végétal dont nous devions la découverte aux pigeons, furent mes principaux matériaux.

Je fis ainsi des selles, des santés, des courroies, des étriers, enfin tout le harnachement nécessaire de nos montures. Mais celles-ci semblaient peu jalouses de l’honneur d’avoir un aussi beau fourniment, aussi nous eûmes toujours besoin de nous servir de l’anneau passé par le nez pour les conduire. Pour atteler les buffles, je préférai la méthode italienne, qui consiste a attacher le joug aux épaules et non aux cornes. La force de ces animaux, en effet, réside dans les épaules, et ils poussent plutôt qu’ils ne tirent. D’ailleurs, ce procédé ne leur permet pas de faire mal avec les cornes, au cas où ils entreraient en fureur.

Le métier à tisser que j’avais préparé pour ma femme lui était d’une grande utilité : je le perfectionnai encore en employant la colle de poisson au lieu de colle ordinaire, que notre petite provision de farine ne nous permettait pas de fabriquer en assez grande quantité. Cette colle de poisson me rendit d’autres services : je la séchai à la chaleur, et j’obtins des carreaux de vitre qui, sans être aussi transparents que le cristal, laissaient cependant pénétrer le jour et mettaient nos fenêtres à l’abri des pluies et du vent.

Nous fûmes distraits de ces travaux par l’arrivée d’un banc de harengs dont la pêche nous occupa quelques jours. Nous avions déjà éprouvé trop souvent combien cette nourriture nous était précieuse pour ne pas saisir avec empressement