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le robinson suisse.

nous devions craindre de leur part une usurpation complète du colombier, et il nous eût coûté de voir les premiers habitants chasser les nouveaux venus. Je fis construire alors quelques pièges destinés aux émigrants au moyen de gluaux disposés aux environs. Grâce à cet expédient, notre table fut abondamment pourvue d’excellents rôtis et l’aigle de Fritz put se reposer. Cinq paires restèrent seulement dans le colombier et toutes cinq furent employées à construire des nids et à couver les œufs.

Ma femme désirait depuis longtemps un métier de tisserand qui l’eût aidée beaucoup dans la fabrication de nos vêtements et de notre linge. Je résolus d’employer à ce travail les débris de roseaux de Jack. J’en partageai deux par la moitié, ce qui me donna les quatre barreaux nécessaires pour les peignes ; un certain nombre de petits morceaux de bois que je fis polir par les enfants devaient me servir à confectionner les dents. Quand tous ces matériaux furent prêts, je les serrai dans un endroit sûr, ne voulant dire à personne l’usage auquel ils étaient destinés, afin que ma chère femme eût toute la joie et toute la surprise de mon œuvre.

Pendant ce temps, notre ménagerie s’était encore accrue d’une nouvelle bête : l’onagre avait mis bas un joli petit ânon dont la vivacité et la gentillesse promettaient pour l’avenir une agréable monture. Tout le monde fut d’accord que moi seul pouvais faire son éducation et que, par conséquent, moi seul devais en être le maître. Je promis de m’occuper sérieusement de dresser le gracieux animal ; je commençai par lui donner le nom de Léger nom qu’il mérita, du reste, plus tard par sa rapidité et sa souplesse. Il y avait encore à terminer bien des arrangements qui nous prirent plusieurs journées. Nous habituâmes aussi nos bêtes domestiques à reconnaître le son d’une espèce de cor fait avec une écorce d’arbre roulée. Ce signal devait les ramener à l’habitation, et, pour nous faire com-