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le robinson suisse.

passage quelques-unes de ces tonnes ; les ayant attachées aux côtés de notre bateau, nous les traînâmes à notre remorque.

Quand nous fûmes plus près du rivage, il perdit un peu de son aspect sauvage, car de loin il nous avait paru affreusement désert. Fritz, de ses yeux perçants, assurait déjà reconnaître certains arbres, entre autres des palmiers. Ernest se mit à vanter la noix de coco, bien préférable, selon lui, à nos noix d’Europe. Comme je me reprochais d’avoir oublié d’apporter le télescope du capitaine, Jack tira de sa poche une petite lunette et me l’offrit.

« Comment, lui dis-je, tu t’étais donc réservé d’abord cette lunette pour toi seul, sans vouloir faire part de ta trouvaille à personne ? »

Il me répondit que son intention n’avait point été de la garder pour lui seul, et qu’il avait seulement oublié de me la remettre.

Je pris la lunette, qui me servit à découvrir un petit enfoncement propre à débarquer ; mes oies et mes canards nous précédaient dans cette direction. Luttant contre les courants, assez rapides en cet endroit, j’arrivai enfin à un point de la côte où le rivage était à peine plus élevé que nos cuves, et où cependant nous avions encore assez d’eau pour voguer ; devant nous était l’embouchure d’un ruisseau qui se déchargeait dans la mer.

Mes enfants s’élancèrent sur le rivage ; François voulut faire de même, mais il était trop petit, et il lui fallut l’aide de sa mère pour le retirer de la cuve.

Les chiens, arrivés plus tôt que nous, nous accueillirent par de joyeux aboiements, pendant que les oies et les canards, entrés dans la baie, poussaient de bruyantes clameurs auxquelles répondaient les cris des manchots, des flamants et autres oiseaux de mer ; il y avait peu d’harmonie dans les voix de ces musiciens sauvages et de nos musiciens civilisés.

Notre premier soin, en touchant le rivage, fut de remer-