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le robinson suisse.

Il fallut nous servir de nos fusils contre les agresseurs ; le bruit de la décharge les mit en fuite. Les pommes de pin qui avaient servi de projectiles aux singes avaient une forme particulière ; Fritz en écrasa une entre deux pierres, et trouva dedans une amande d’un goût agréable ; m’étant approché de lui et ayant à mon tour examiné les morceaux, je reconnus le pin pinier[1], qui donne un fruit bon à manger et une huile à brûler excellente et sans aucune odeur.

« Ne t’occupe point maintenant à écraser ces pommes, dis-je à Fritz, je t’apprendrai une manière plus commode de les ouvrir ; ramasse seulement toutes celles que tu vois à terre. »

Quand nous eûmes atteint la colline qui, par une pente douce, monte jusqu’au cap de l’Espérance trompée, à peu de distance du champ des cannes à sucre, nous dressâmes notre tente sous l’ombrage d’un bouquet de palmiers, près d’une source d’eau. Il était impossible de trouver un endroit plus convenable pour l’établissement de notre seconde métairie : eau, belles prairies, bois touffus, rien ne manquait.

Les enfants, par mon conseil, allumèrent du feu et posèrent leurs pommes de pin quelques minutes sur les charbons ardents ; elles éclatèrent d’elles-mêmes en produisant une petite détonation ; il fut alors facile d’ôter les amandes.

Dans l’après-midi, il fallut commencer les travaux de construction de la nouvelle métairie. Nous allâmes vite en besogne ; le plan et les divisions intérieures de Waldegg furent suivis. Six jours nous suffirent pour son achèvement. Ernest voulait, sans doute pour nous donner un petit air anglais, que cette métairie reçût le nom de Prospect-Hill ; pour moi, fidèle à notre chère langue allemande, je préférais l’appeler Shattenbourg ou Schauenbach. Prospect-Hill obtint la préférence ; je dus céder devant la majorité.

  1. On appelle encore cet arbre pignon doux, et ses fruits pignoles.