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le robinson suisse.

gniers et nos cerisiers étaient courbés du même côté par le vent. Je me chargeai de faire les trous avec un instrument de fer assez long ; mes fils coupaient les bambous et les fichaient en terre, puis y attachaient les arbres avec une liane souple qui se trouvait non loin de là.

Tout en travaillant, nous parlions de la culture des arbres, dont mes enfants s’étaient contentés jusqu’alors de manger les fruits sans s’occuper beaucoup du reste. Ils me firent sur ce sujet beaucoup de questions. Je vais rapporter les principales, en y ajoutant mes réponses et mes remarques. Cet entretien ne sera pas sans quelque utilité pour ceux qui aiment l’agriculture.

« Mon père, les arbres que nous avons plantés ici sont-ils sauvages ou cultivés ? demanda Fritz.

jack. — Quelle question ! t’imagines-tu qu’on apprivoise les arbres comme les animaux ? Espères-tu apprendre à ces noyers, à ces châtaigniers, à baisser plus tard poliment leurs branches devant nous, afin que nous ayons moins de peine à cueillir leurs fruits ?

fritz. — Tu penses dire là, monsieur Jack, une chose très-spirituelle, et tu ne dis qu’une sottise. Je ne crois pas qu’il faille traiter les arbres comme les bêtes ; mais il y a certain jeune garçon de ma connaissance, naturellement mutin et désobéissant, à qui l’on ne ferait peut-être pas trop mal de passer une corde dans le nez pour pouvoir le conduire comme le buffletin.

moi. — Allons, mes amis, point de moquerie, point de paroles injurieuses. Fritz a raison de dire qu’on ne traite pas les plantes comme les animaux. Ces arbres, qui, à l’état de nature, ne portaient que des fruits petits et de mauvais goût, en produisent maintenant d’excellents, grâce à la greffe. Regardez cette branche ; voyez-vous qu’on l’a fait entrer dans le tronc par incision ? et, afin que le suc nourricier n’alimentât qu’elle seule, on a eu soin de couper toutes les autres.