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Mon brasselet, je te veux honorer
Comme mon plus precieux en ce monde :
Aussi viens tu d’une perruque blonde,
Qui pourroit l’or le plus beau redorer.

Mon brasselet, mon cher mignon, je t’aime
Plus que mes yeux, que mon cœur, ny moy-mesme,
Et me seras à jamais aussi cher

Que de mes yeux m’est chère la prunelle :
Si que le temps ny autre amour nouvelle
Ne te feront de mon bras delascher[1].

XIV

J’aime le verd laurier, dont l’hyver ny la glace
N’effacent la verdeur, en tout victorieuse,
Monstrant l’eternité à jamais bien heureuse,
Que le temps, ny la mort ne change ny efface.

J’aime du hous aussi la tousjours verte face,
Les poignans eguillons de sa fueille espineuse :
J’aime le lierre aussi, et sa branche amoureuse
Qui le chesne ou le mur estroitement embrasse.

J’aime bien tous ces trois, qui tousjours verds ressemblent
Aux pensers immortels, qui dedans moy s’assemblent,
De toy que nuict et jour, idolâtre, j’adore :

  1. delascher, lâcher