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AVERTISSEMENT
des grands, auxquels se joignent une Comédie fort plaisante, l’Eugene et deux tragédies Didon et Cleopâtre, renouvelées des anciens.

Le succès d’un tel livre fut assez vif pour nécessiter sa reimpression en 1583 et en 1597, mais il ne justifia pas, que nous sachions, le dessein qu’avait son premier éditeur, Charles de la Mothe, de le faire suivre de quatre ou cinq tomes, à peu près semblables, dont on possédait alors la matière. Que sont devenus ces manuscrits inédits du poète ? Nul ne le sait, et ne le saura sans doute jamais, tant d’orages ayant détruit, depuis cette époque, les meilleurs monuments de la tradition, et d’autre part, la postérité se montrant rebelle aux rimeurs. Des siècles ont passé ; l’oubli est venu, et peut-être Jodelle ne fournirait-il de nos jours qu’un simple nom, qu’une épithète aux anthologies, si la gloire de Ronsard, dont il avait été le disciple et l’ami, ne l’eut éclairé de son reflet. Le XIXe siècle, on le sait, affecta de réparer les injustices des siècles qui le précédèrent. On s’informa des écrivains de la Renaissance. Les gloses provoquèrent des curiosités. Nous eûmes un jour une édition de la Pléiade. Jodelle parut pour la quatrième fois et son mérite, jadis obscur, s’accrut du zèle de ses commentateurs. Il devint pour tous, le père de notre théâtre national, bien que ses pièces ne soient pas, à proprement parler, des œuvres originales. On vanta les mérites de son vers rude, mais puissant, et si français, qu’une édition de ses poèmes peut, ainsi qu’on le vérifiera, se passer de tout commentaire philologique.

Il est aujourd’hui une sorte de grand ancêtre duquel on ne saurait écrire sans montrer quelque circonspec-