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riomphans,
Non la pitié que j’ay si par moy, miserable,
Est rompu le filet, à moy, ja trop durable.
Courage, donc, courage (ô compagnes fatales)
Jadis serves à moy, mais en la mort égales,
Vous avez recogneu Cleopatre princesse,
Or ! ne recoignessez que la Parque maistresse.

CHARMIUM.
Encore que les maux par ma Roine endurez,
Encore que les cieux contre nous conjurez,
Encore que la terre envers nous courroucee,
Encore que la Fortune envers nous insensee ?
Encore que d’Antoine une mort miserable,
Encore que la pompe à Cesar desirable,
Encore que l’arrest, que nous fismes ensemble
Qu’il faut qu’un mesme jour aux enfers nous assemble,
Eguillonnast assez mon esprit courageux
D’estre contre soymesme un vainqueur outrageux,
Ce remede de mort, contrepoison de dueil,
S’est tantost presenté d’avantage à mon œil :
Car ce bon Dolabelle, ami de nostre affaire,
Combien que pour Cesar il soit nostre adversaire,
T’a fait sçavoir (ô Roine), apres que l’Empereur
Est parti d’avec toy, et apres ta fureur
Tant equitablement à Seleuque monstree,
Que dans trois jours prefix ceste douce contree
Il nous faudra laisser, pour à Romme menees
Donner un beau spectacle à leurs effeminees.

ERAS.
Ha ! mort, ô douce mort, mort, seule guarison
Des esprits oppressez d’une estrange prison,
Pourquoy souffres tu tant à tes droits faire tort ?
T’avons nous fait offense, ô douce et douce mort ?
Pourquoy n’approches-tu, ô Parque trop tardive ?
Pourquoy veux-tu souffrir ceste bande cap