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graduellement en acheter, à des prix très-bas, assez pour faire honneur à leurs engagements quand les titres leur seraient présentés. Il est certain qu’on a vu ce genre d’opérations réussir sur d’autres marchés.

Il y a dix ans environ l’habitude s’établit d’encombrer subitement le marché avec des titres de Compagnies de banques particulières par actions. Une société se formait, peut-être sans posséder aucune des actions de la Compagnie choisie ; puis elle se mettait à vendre des quantités considérables de ces actions, dans l’espérance d’entamer ainsi la réputation de la Compagnie, et de faire baisser la valeur des actions assez tôt pour en racheter une quantité suffisante avant l’échéance fixée pour la livraison. Ces spéculations malsaines furent arrêtées par un Acte du Parlement (A. 30 Victoria, c. 29, 1867) qui oblige maintenant le vendeur des actions de banque à spécifier les numéros, ou les noms des propriétaires, des actions qu’il vend pour une livraison à terme.

Sans doute on peut soutenir qu’il y a pour tout le monde un droit naturel de prendre des engagements, quand on en espère quelque profit. Toute personne peut accepter un billet par lequel elle s’engage à verser une certaine somme à telle époque à venir. Il arrive tous les jours que l’on fait des transactions où l’on s’engage à livrer du blé, du coton, d’autres marchandises qui doivent arriver par mer, et cela, avant que le moment de la livraison soit arrivé. Mais nous devons nous rappeler que toutes les lois et toutes les relations sociales sont combinées de manière à assurer au plus grand nombre le plus grand bien possible. Si le droit de prendre toutes sortes d’engagements est reconnu par la loi, cela doit être parce que ce droit est avantageux pour la société, et c’est la loi qui en fait un droit en le reconnaissant. Si, au contraire, on constate par expérience que la liberté de faire et de vendre des engagements d’une certaine nature donne lieu à des spéculations non permises, ou en d’autres termes, cause à la société plus de mal que de bien, la loi doit certainement restreindre cette liberté et régler la matière à l’avantage de la communauté. Tout cela n’est, en somme, qu’une question de mesure. On s’était accoutumé a regarder comme un principe général de jurisprudence que