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aurait pu la détourner de sa vocation providentielle. Mme d’Youville, en vivant sous le toit et la tutelle de la mère de son mari, avait appris à sacrifier sa volonté propre et ses goûts les plus légitimes. C’est ainsi que, sans le savoir, la belle-mère entrait dans les desseins de Dieu.

Après quelques années de cette vie commune et crucifiante, Mme d’Youville mère mourut. Cette mort allait-elle faire réfléchir ce mari indifférent et volage, et la jeune femme allait-elle pouvoir enfin goûter un peu de ce bonheur dont elle était si digne et qu’elle avait jusqu’ici attendu en vain ? Loin de là.

La mère de M. d’Youville avait laissé à son fils en mourant un fort bel héritage ; celui-ci profita de cet accroissement de fortune pour se livrer avec plus de liberté à la vie dissipée qu’il menait depuis son mariage. Bien plus, à cette indifférence s’ajoutèrent bientôt le délaissement et l’abandon. Prévenante et affectueuse pour son mari, Mme d’Youville ne reçut en retour que froideur et même dureté. Son cœur délicat et sensible fut brisé de douleur en voyant son amour si vrai et si profond méconnu et repoussé. Ce fut alors qu’elle tourna son âme vers Dieu et qu’elle commença à placer en lui toutes ses espérances. « Les élus de Dieu, » a dit un orateur contemporain, « sont le froment qu’il sème dans les sillons tourmentés de la vie publique ou privée, et qui germent souvent