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contre elles. [1]. Ce sont là ces collines sur lesquelles régnait Saiil, quand il faisait mettre à mort les prêtres de Dieu,[2] puisque Gabaa veut dire « colline. » L’expression : « Les collines du monde ont été abaissées », est des plus vraies. Avant la venue du Sauveur, elles marchaient la tête haute, et nul ne pouvait humilier leur orgueil. Or, elles ont été mises en poudre et abaissées dans les chemins de son éternité, c’est-à-dire de l’éternité de Dieu, soit parce que son éternité elle-même a daigné venir à nous, soit parce sans cesse, depuis le commencement du monde jusqu’à son incarnation, elle est venue vers les saints, que la parole de Dieu s’est faite dans la main de chacun d’eux, qu’il a vaincu dans tous ceux qui ont été vainqueurs, et que son chemin éternel a ainsi abaissé les collines et réduit en poudre les montagnes. Voilà le commentaire métaphorique du texte hébreu.

D’après les Septante, après que la parole a précédé la face de Dieu, et qu’elle est sortie dans les plaines, Dieu le Père vient dans les lieux qui ont été préparés pour sa parole, il vient sur les traces de celle-ci, et il s’arrête, ne la devançant jamais et attendant toujours qu’elle lui ait frayé la voie. Or, dès qu’il s’arrête sur les pas de sa parole, là même, et aussitôt, la terre est ébranlée, c’est-à-dire toute œuvre de la chair et du corps, parce qu’elle ne peut soutenir la présence de Dieu. Lorsque ces œuvres ont été ébranlées, Dieu, dans la vertu de sa parole et dans sa présence, jette les yeux sur toutes les nations de l’âme, sur les pensées et sur les opinions multiples de l’âme en divers sens, pouvons-nous dire, et ces nations aussitôt se fondent et tombent en poudre. Tout ce qui dans la terre s’était élevé contre la science de Dieu et avait imposé son joug à la raison de l’auditeur, la venue de Dieu, précédé de sa parole, le brisera et le réduira en cendres. Les montagnes étant brisées et pulvérisées en la présence de Dieu, les collines évidemment seront consumées et anéanties ; car ce sont ici, non les montagnes de Dieu, mais celles du siècle. Le chemin éternel de Dieu, qui jette les yeux partout où sa parole le précède, dès qu’il est plus fort que les collines du siècle, les consumera et les détruira.

On peut aussi, par montagnes, entendre les démons, qui habitent dans les hérétiques et s’élèvent contre la science de Dieu ; les collines, à leur tour, ce sont d’autres esprits infernaux qui font que les hommes admirent la beauté du corps, les dignités, les richesses, la noblesse de la race, et les autres biens du monde. Il nous est donné de voir comment, après la venue de la parole de Dieu et la présence de Dieu le Père, les âmes sont ébranlées, comment tout ce qui est terrestre est dissous, comment toutes les pensées d’autrefois sont anéanties. Alors sont détruits les démons, alors sont entièrement nivelées les hauteurs du siècle, et toute science

  1. Jer. 30, 1
  2. 1Sa. 22, 1