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La prophétie, d’autre part, s’applique également bien à l’Antéchrist, ou au diable, qui opère dans l’Antéchrist. Celui-ci aussi, au moyen de sa coupe, par où il désire renverser la discipline de Jésus-Christ, enivrera bien des hommes, afin que, dans leur ivresse, ils entrent dans ses cavernes ; mais, quand la fin sera venue, au lieu de cette gloire dont il s’était enorgueilli, il sera rempli d’ignominie. Il en sera rempli, parce qu’il boira la coupe des supplices, et il sera ébranlé ; il sera, bien loin d’être ferme dans sa malice, tremblant et pris d’un repentir tardif. C’est qu’il sera circonvenu par la coupe du Seigneur, qui est notre Seigneur et Sauveur, lorsqu’il le mettra à mort du souffle de sa bouche, et qu’il le détruira par la clarté de son avènement. Alors, toute l’ignominie qu’il a amassée contre lui par ses pensées, par ses actions et par ses paroles, se répandra sur sa gloire, en sorte qu’autant il était auparavant regardé comme noble, autant il sera ensuite couvert d’ignominie ; car il a blasphémé contre Dieu, l’impiété qu’il a exercée sur le Liban retombera sur lui, et la fureur de tant d’hommes qui ont tenu une conduite criminelle contre l’Église lui sera imputée. Il ne pourra plus alors lever un front orgueilleux, et, frappé de terreur, il le courbera vers la terre ; car il a mis à mort un grand nombre d’hommes, et son impiété a porté le ravage dans tout l’univers, c’est-à-dire dans l’Église de Jésus-Christ et parmi ses habitants.

Une remarque qui a sa place ici, c’est que le texte que je viens de commenter : « Malheur à celui qui donne à boire à son prochain son renversement dans an breuvage trouble », et les trois précédents où il est dit : « Malheur à celui qui multiplie dans ses trésors ce qui ne lui appartient pas », et ensuite : « Malheur à celui qui amasse l’avarice criminelle pour sa maison », et enfin : « Malheur à celui qui bâtit mie ville dans le meurtre », sont dirigés, soit selon la lettre, soit selon l’esprit, ou contre Nabuchodonosor, ou également contre le diable et contre 3’Antéchrist et contre les hérétiques.


« Que sert la statue au sculpteur qui l’a faite ou l’image fausse qui se jette en fonte ? et néanmoins l’ouvrier espère en son propre ouvrage et dans l’idole muette qu’il a formée. » [1]. Les Septante : « Que sert la statue à ceux qui font sculptée ? que sert d’avoir formé en fonte une image fausse ? et néanmoins l’ouvrier met sa confiance dans son propre ouvrage et dans l’idole muette qu’il a faite. » Comme conséquence de ce qui précède, il est reproché à Nabuchodonosor d’avoir fabriqué la statue de l’idole Bel, et de l’avoir fait dresser dans la plaine de Dura, ou, comme l’écrit Daniel, de Dora, événement sur lequel ce Prophète nous édifie pleinement. [2]. L’Écriture s’étonne donc de la sottise et de la folie de ce roi qui a ordonné de fabriquer une statue d’or, et qui met sa confiance dans l’idole qu’il a fait faire ; ce qui, du reste, peut s’appliquer en général à tous les adorateurs d’idoles. Et qu’on ne croie

  1. Hab. 2, 18
  2. Dan. 3, 1