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ce monde et sur tous les peuples ? Eu égard à ses forces, nul de nous ne peut donc lui résister. Mais, eu égard à votre miséricorde, c’est uniquement par vous que nous vivons, qu’il ne nous a point mis à mort, que nous n’avons pas été entraînés aux œuvres de mort ; car c’est vous, Seigneur, qui l’avez établi pour juger, et qui en avez fait notre ennemi et l’instrument de votre vengeance, afin de châtier par lui quiconque aura péché contre vous.

Puisque nous avons tout d’abord vu la figure des démons dans les Chaldéens et celle de Satan, leur roi, dans Nabuchodonosor, il nous faut faire une esquisse rapide du diable et de sa puissance, pour mettre en relief la justesse de ces mots du Prophète : « Seigneur, vous l’avez établi comme juge, et c’est pour exercer vos châtiments que vous l’avez fondé dans la force. » C’est contre les incrédules et les contempteurs de Dieu qu’est suscitée la nation des démons, amère dans le châtiment et présente partout. Elle marche sur toute l’étendue des terres pour s’emparer des hommes, en qui Jésus-Christ doit faire sa demeure. Elle répand l’horreur et l’effroi, et c’est bien difficilement qu’on en triomphe ; elle ne peut être anéantie qu’en arrivant à sa ruine, sous l’écrasant fardeau de ses crimes énormes et de son iniquité. Ses chevaux et ses cavaliers seront toujours altérés de sang comme des léopards et des loups ; ils seront avides de proies, ils feindront l’absence, et ils fondront sur nous de loin, quand on ne les attendait pas. Ils voleront comme l’aigle, qui, élevant son essor, voudrait placer son aire au milieu des astres du ciel, et accourt partout où il y a une proie. Dans Ézéchiel aussi est le portrait du diable, sous les traits de Nabuchodonosor et du roi d’Égypte. Aucun démon ne montrera de pitié ; ils accourront tous à la proie, et un vent brûlant les précédera ; tout ce qu’ils verront, tout ce qui se présentera sur leur passage, ils souhaiteront de le brûler et de le perdre. Leur roi lui-même, dans toute sa puissance, sera au milieu des captifs ; il en recevra de toutes parts de ses satellites, en aussi grand nombre que les grains de sable de la mer, et il triomphera lui-même des rois, et les tyrans seront sa risée ; car il trompera de nombreux saints par sa ruse, et ceux qui se flattaient d’être très-puissants, de gouverner despotiquement les démons, et de les repousser loin de leurs corps assaillis, il les réduira en esclavage et en fera un objet de dérision. Pour lui, dans sa force, réunissant les bataillons et rassemblant l’armée de ceux qu’il a perdus, il se rira de toute forteresse et prétendra renverser tout ce qui est fort. Il fera une levée de terre, il élèvera tout autour les œuvres terrestres, et, lorsque la terre aura été amassée en une levée, il s’emparera facilement de toute forteresse. Après une aussi grande victoire, son esprit sera changé, son visage passera jusque dans le ciel, et, en se disant Dieu, il blasphémera