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dont le hennissement, le pied creusant la terre et le poitrail brûlant aspirent sans cesse à la guerre ; le Seigneur le dit du diable : « Il flaire de loin la guerre ; de ses bonds, de ses cris il ne fait point grâce aux fuyards et ne laisse point s’en aller ceux qui tournent le dos ; » mais il poursuit pour terrasser, tuer, fouler aux pieds et briser. Il y a aussi dans Ninive le bruit du char impétueux ; tels, sans doute, étaient ceux de Pharaon que le Seigneur engloutit dans les flots. À ce char sont attelés quatre chevaux, c’est-à-dire quatre passions sur lesquelles dissertent les philosophes et que Maron signale quand il dit : Ils désirent et craignent, ils s’attristent et se réjouissent… Virg. 6, Æneid.. Par ces coursiers et ce char, Ninive jette partout le trouble. En môme temps se fait entendre la voix du cavalier qui s’avance, et qui, en possession d’un art particulier, et préparé par l’exercice à la guerre, s’avance non sans péril pour quiconque combat contre lui. Ce cavalier, en effet, porte le glaive de la parole, aiguisé sur la pierre de la dialectique et assoupli par l’huile d’une rhétorique étudiée ; il a des armes resplendissantes, Satan se transfigurant en ange de lumière, et ses armes sont l’opposé des armes apostoliques. Rien d’étonnant si, dans Ninive, il y a des multitudes de blessés quand il s’y trouve des quantités de flèches. Et comme nous avons pour nous protéger et combattre les quatre boucliers des vertus, la prudence, la justice, la tempérance, la force, pareillement et par contre, il y a quatre vices, la folie, l’injustice, la luxure et la crainte, par lesquels nous sommes frappés de l’ennemi. Or, chacun d’eux porte en lui des traits en si grand nombre et d’espèces si variées, que si le remède n’est point aussitôt appliqué, grande devient la ruine, et plût au ciel qu’il y en eût autant dans Ninive de simplement et de légèrement atteints qu’il y en a, tant le mal est profond, de précipités jusque dans l’abîme. Ce n’est point la fin pour ses peuples : sa malice n’a pas de limites, et autant il y a d’espèces de péchés, autant il y a pour Ninive de peuples dont la maladie envahira les corps à cause du nombre de ses fornications. Quoique ceci puisse aussi s’entendre de ceux qui, en sacrifiant aux plus basses passions, affaiblissent leur corps et perdent avec leur âme la chair à laquelle ils se prostituent, néanmoins ces peuples dont nous venons de parler ne tombent que sur leurs corps et ne se heurtent comme l’a interprété Symmaque, qu’aux cadavres des morts dont la multitude des fornications a jonché la terre. Ici, tandis que, d’après l’hébreu, nous avons dit : « À cause du nombre des fornications de la courtisane », les Septante écrivent comme si c’était le point de départ d’une autre pensée ; ils disent : « À cause de la multitude des fornications ; » et bornant là l’idée, ils reprendraient ensuite : « Courtisane belle et gracieuse, maîtresse en maléfices. » Pour maîtresse en maléfices, Aquila et Symmaque ont