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« J’avais osé croire à un élément plus léger que l’air. Pourquoi pas ? Ne connaissons-nous pas des métaux qui existaient mais que nous ignorions, le « radium » par exemple, l’« uranium ». Il n’y a pas si longtemps qu’un savant découvrit que l’« hydrogène » se solidifiait et était de nature métallique. Nous avons le « mercure » par exemple qui est un métal liquide, si cette dénomination peut être considérée exacte. Tout ceci me torturait si bien l’esprit que je crus que je devenais fou et que si je ne mettais un terme aux fougues de mon imagination, je finirais par aller habiter une des cellules de l’Asile de la Longue-Pointe.

« J’en étais donc là dans mes vagues hypothèses, lorsqu’un beau jour il m’arriva l’étrange aventure qui devait bouleverser mon existence toute entière.

« J’étais depuis quelques mois de retour de mon voyage d’Europe et j’avais accepté — ceci pour remettre à flot mes finances ébréchées — une position en qualité d’ingénieur dans une compagnie opérant des tracés dans l’Ouest canadien, ceci pour le compte d’une compagnie de chemin de fer voulant établir une ligne jusqu’au Yukon.

« Tu me vois d’ici, moi venant tout droit de Paris, tomber dans la solitude la plus absolue, car à part une trentaine d’hommes qui étaient sous mes ordres, je ne voyais âme qui vive. Des montagnes, des vallées, des précipices, d’interminables forêts de sapins, rien que ronces et rochers, pas la moindre distraction que celle de travailler à relever des plans et étudier des chemins praticables.

Il faut avoir besoin de gagner sa croûte de pain pour se livrer à une vie semblable.