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problème peut-être plus difficile que vous ne le pensez vous-même. D’abord, connaissez-vous l’adresse de votre adversaire ?

« Voici sa carte, dit Duval en me présentant un bristol d’une propreté douteuse.

« Je pus lire : Vicomte Raoul de Sérac, maître d’armes breveté, 55 rue du Dragon.

« Diable, lui dis-je, après avoir lu, vous me semblez un homme bien malade.

« Vous croyez ? me dit Philias Duval d’un air inquiet.

« Allons, mon pauvre ami, je vais arranger, du moins je vais essayer de régler à l’amiable toute cette affaire. Donnez-moi l’adresse du docteur Brindavoine et je cours chez lui prendre des renseignements.

« Philias Duval étant parti, je terminais ma toilette et me rendis rue Monsieur le Prince où restait le docteur Brindavoine.


V

RES NON VERBA.


Le docteur Brindavoine habitait, venons-nous de dire, un hôtel meublé de la rue Monsieur le Prince. Cette rue est fort connue de tous ceux qui ont habité le Quartier Latin, étudiants en droit ou en médecine, et beaucoup surtout des disciples de l’École des Beaux-Arts. L’appartement de Brindavoine n’était pas luxueux, une chambre à coucher avec un petit cabinet de toilette adjacent.

Brindavoine lui aussi était canadien, de Sorel, avait étudié la médecine à l’Université Laval, puis était allé professer à Lowell, aux États-Unis. C’était un beau gaillard d’environ vingt-sept à vingt-huit ans, bien découpé, bon enfant, joyeux compagnon qui tout en aimant bien s’amuser ne négligeait pas ses études et savait comme bien d’autres de ses compatriotes alors à Paris unir le plaisir à un travail scientifique des plus sérieux.

« Diable ! s’écria-t-il en m’apercevant, quel bon vent vous emmène ?

« Voici, lui dis-je en m’asseyant sur le siège qu’il m’offrait, je viens vous causer de l’inénarrable Monsieur Philias Duval.

« En entendant prononcer le nom de l’entrepreneur, Brindavoine partit d’un rire homérique et fut pendant quelques minutes avant de pouvoir reprendre sa respiration normale.

« Parlez, me dit-il, lorsqu’il fut remis, il me tarde de vous entendre.