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tru, court sur jambes, une figure patibulaire avec un nez trompette, des yeux en trous de vrille et la lèvre supérieure surmontée d’une moustache rousse en broussailles.

« Comme vêtements, un complet jaune foncé quadrillé de rouge, des pantalons venant un peu plus haut que les chevilles, un melon à rebord plat et d’une couleur indescriptible était posé sur sa tête ; il portait à la main un parapluie roux, jadis noir, terminé par un pommeau en tête de canard.

« Voici un modèle, pensai-je, que si mon ami Suzor Côté voyait, il brûlerait de l’envie de l’esquisser.

« Que diable, qu’est-ce ? D’où vient-il ? Que cherche-t-il ? Intrigué je m’approchais de lui et lui demandais :

« Monsieur, cherchez-vous quelque chose ?

« Il me considéra pendant quelques secondes, puis probablement rassuré par mon sourire engageant il me demanda :

« C’est-y loin d’icitte éiousque se trouve l’Hôtel St-Georges ?

Stupéfait, je reculais surpris et lui dis :

« Vous êtes canayen, vous ?

« Comment que vous voyez ça ? me demanda-t-il étonné.

« C’est pas tant que ça se voit, lui dis-je, mais ça s’entend.

C’est-y loin d’icitte éiousque se trouve l’Hôtel St-Georges ?

« C’est pas créyable, me dit-il, mais vrai, là, vous avez la devinette bien placée.

« Alors vous cherchez l’Hôtel St-Georges ? lui demandai-je.

« C’est ben de même, me répondit-il.

« Alors, venez avec moi, lui dis-je, c’est justement là que j’habite.

« Si vous demeurez là, fit-il, vous connaissez peut-être l’homme que je veux voir, un Canayen lui itou, qui répond au nom de Baptiste Courtemanche.