Page:Jeanne Landre-Echalote et ses amants 1909.djvu/74

Cette page a été validée par deux contributeurs.
échalote et ses amants

Plusch, hébergé et choyé dans l’hôtel de la fameuse baronne, ils s’introduisaient l’un et l’autre, et sur un signe de la patronne, dans les armures moyen-âgeuses de l’antichambre et cela pour ne point troubler la quiétude et l’incognito des visiteurs soudainement annoncés. Il casquait maintenant et tout de suite, de lui-même, redoutant la demande de la donzelle et la désillusion que serait, pour son amour-propre et son imagination difficilement maintenue, ce rappel aux devoirs du client d’amour et de passage.

Gratin, limonadier d’élite, à qui Montmartre était redevable de ses principaux restaurants de nuit et qui avait apporté à l’organisation de ces lupanars à musique le charme de son érudition et de son goût. Il reconstituait les cuisines d’antan, faisait confectionner, sous le nez des consommateurs, des plats savoureux et oubliés, organisait des festins pantagruéliques et des processions de comestibles parés, enrubannés et portés haut. Sa fameuse « soupe à la plume » mijotait sur un réchaud, au milieu de la salle. N’en avait pas qui voulait et il fallait connaître son époque et ses légendes pour y avoir droit. Marié à une femme économe, rétive à l’ouverture des cordons de la bourse conjugale et qui s’effrayait des tentatives onéreuses de l’héraldique cuisinier, Gratin s’était

* 66 *