Page:Jeanne Landre-Echalote et ses amants 1909.djvu/52

Cette page a été validée par deux contributeurs.
échalote et ses amants

égratignures qu’il donnait l’aspect d’un cirque miniature livré aux ébats de chats en rut ou en colère.

L’exubérance de ces deux professionnelles du surin constituait le seul incident déplorable de sa carrière d’homme à femmes. Avant elles et depuis elles, le succès n’avait pas boudé. C’étaient, par ordre numérique, le stage plus ou moins prolongé dans le rez-de-chaussée du 14 de la rue Clémence de Ranavalo, jeune personne au teint bronzé, au nez aplati et aux cheveux plats ; de la duchesse de Luxembourg, gaillarde à l’accent germanique qui, de séances chez les peintres en intimités chez les vieux garçons, était arrivée à s’exhiber en maillot chair sur les scènes de music-halls ; de la princesse des Canaries, si serine qu’on eût pu la mettre en cage ; de Mme du Sommerard, horizontale du quartier latin, expulsée de la rue du même nom ; de Pois-Vert, déjà citée par Échalote et comme elle marchande des quatre-saisons ; du Lapin-russe, ainsi baptisée à cause de la couleur de ses yeux. « Par quelle aberration du goût, — avait-on objecté à Plusch, — pouvez-vous posséder une compagne ornée de paupières jambonniques et de pupilles indéfinissables ? — Comment, — répondait-il, — tout le monde a des maîtresses aux yeux bleus, verts ou bruns. J’en ai trouvé une qui a les yeux rouges et vous voulez que je la change ? »

Ingratitude et manque de sens pratique, le Lapin-russe lâcha très vite M. Plusch pour se faire l’Égérie du plus bel escrimeur moderne. Mais si celui-ci

* 44 *