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quand les veufs vont par deux

toute la violence de sa rage, s’était abattu sur les orteils de M. Plusch. Après quoi elle s’était sauvée comme une voleuse. Les femmes ont des moyens d’attaque que les hommes ne prévoient pas et auxquels ils peuvent d’autant moins riposter que les combattantes prennent la poudre d’escampette dès leur forfait commis. M. Plusch en fut quitte pour se frictionner la place endolorie et pour décider de ne plus circuler chez lui sans chaussures. Justement il se souvint d’une paire de galoches bizarres, commandées pour un bal de carnaval et qui devaient moisir dans un placard. Il les découvrit. C’étaient deux formidables pieds de carton-pâte chaudement doublés de flanelle et qui, lorsqu’on les avançait, produisaient le plus formidable effet. Un pouce hérissé, des callosités dans tous les sens, des corn-plasters couronnant les doigts et tout cela boursouflé, monumental, vrai jouet d’horreur et de dégoût.

— C’est bête, — songea-t-il, — voilà longtemps que je possède ces pantoufles et je ne les utilise pas.

Dès lors il les chaussa chaque jour aux heures du chez soi. Et ce ne fut pas une des moindres attractions du 14 de la rue Clémence que de voir le locataire du rez-de-chaussée et ses extrémités titaniques traverser la cour, aux moments présumés du courrier, pour aller demander à Blandine une correspondance que la paresse reconnue de Plumage dédaignait de porter aux intéressés.

Qu’attendait-il ? quel présage divin ? quel rameau d’olivier porté par la colombe ? comme eût dit le

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