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échalote et ses amants

les renseigner sur le produit de ses opérations nocturnes. Cette catégorie de protecteurs n’est pas la meilleure. Ils sont pointilleux et acariâtres, froissés par une trop longue veille et irascibles quand la chasse a été mauvaise. Les manilles, les zanzibars, les petits marcs et les vins chauds n’ont pas calmé leurs nerfs susceptibles. Ils n’ont qu’une relative confiance en l’habileté de leur élève et redoutent le client désœuvré qui leur fera perdre, pour une rémunération indigne, un temps précieux et limité. Une nuit gâchée ne se rattrape pas. Il le sait, lui, le petit homme qui, levé le premier, va chez la blanchisseuse réclamer le linge de linon, chez la teinturière retirer les chemisettes et les jupons dégraissés, qui subit les récriminations des créanciers et ouvre la porte aux garçons de recettes de Dufayel. Ah ! son métier n’est pas la sinécure qu’un vain peuple suppose. Il faut avoir l’œil à tout : aux dessous de l’associée comme à sa coiffure, à la propreté de son corps comme aux soins de sa santé. On les voit celles qui s’entêtent à vivre seules, par économie paraît-il, et qui déambulent les frisettes au vent, la jupe mal jointe et les talons éculés ! Où la femme en ménage se fera un pont d’or, la gigolette célibataire traînera sa misère : il lui manque l’inspection du maître et la crainte des mornifles et tourlousines réservées à ses fiasco.

Certes le catéchisme de la demi-mondaine reste à écrire. Elle y lirait ses devoirs et y trouverait, toute tracée, sa ligne d’inconduite. Elle y verrait que chaque

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