Page:Jeanne Landre-Echalote et ses amants 1909.djvu/189

Cette page a été validée par deux contributeurs.
monsieur dutal

— Tu vois que j’avais raison de vouloir connaître ce louftingue.

— Pour sûr. Tâche maintenant de le faire casquer jusqu’à son dernier rond et balance-le dès qu’il sera à sec.

— N’aie pas peur, mon coco, on sait y faire.

L’existence d’Échalote s’écoulait donc ainsi. Le matin elle recevait, de M. Plusch, l’argent nécessaire à sa journée, l’après-midi elle retrouvait Victor et allait transpirer en sa compagnie à Tabarin, le soir elle « vendait sa salade » à son concert, rejoignait M. Dutal et allait souper avec lui.

Comme elle avait un de ces heureux caractères qui répugnent à dissimuler leurs fantaisies, elle affichait son nouvel amant et arborait son luxe. Chaque soir une voiture les déposait chez Raff où ils consommaient leurs premiers sandwichs. Ce décor plaisait à M. Dutal, qui aimait entendre, en même temps que les roulements de dés des jacquets, les conversations de certains habitués, lesquelles n’étaient ni dans une bouteille ni dans une terrine. Un couple, particulièrement, l’intéressait. Il se composait d’un homme, au système pileux abondant, que l’on nommait le baron et d’une femme, jamais la même, mais qui donnait toujours l’illusion d’être la vraie compagne du monsieur à barbe. Le baron était riche, la femme invariablement jolie, leur gaieté était communicative et leurs amis nombreux. Ce baron, cas unique, n’avait pas de domicile ; il logeait tantôt ici, tantôt là, hier chez un camarade, demain dans un

* 181 *