Page:Jeanne Landre-Echalote et ses amants 1909.djvu/18

Cette page a été validée par deux contributeurs.
échalote et ses amants

femmes de ménage levées tôt, des filles de joie couchées tard ou pas du tout, des tas de coquilles d’huîtres au bord des trottoirs, des mosaïques de trognons de choux, de queues de salsifis et de feuilles de carottes sur la chaussée, telle est la rue Lepic, à Montmartre, vers onze heures du matin.

Nul autre endroit de Paris n’offre ce spectacle. Ailleurs, c’est la bousculade des gens d’affaires et le trottinement des fourmis travailleuses. Ici, c’est la flânerie de ceux qui contemplent la vie en amateurs, le marché fantaisiste des gens qui, n’ayant qu’eux-mêmes à nourrir, se tourmentent peu de l’heure des repas et de la toilette à faire pour se mettre à table. On déjeune le plus souvent de choses illusoires ou de cuisine toute préparée. Les charcutiers réduisent une porcherie entière en côtelettes à la sauce qu’on livrera fumantes et illustrées de cornichons coupés, les fruitiers vendent des légumes bouillis, les bouchers du bœuf tout chaud et les rôtisseurs dépècent des volailles blanches et

* 10 *