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Lycaste, Parasie, et mille autres divers,
Qui dans les premiers temps ont régi l’univers ;
Et récemment encor dans Rome, Vitellie,
Gordian, Pertinax, Macrin, Probe, Aurélie,
N’y sont-ils pas montés, et fait de mêmes mains
Des règles aux troupeaux et des lois aux humains ?
Et moi-même, enfin moi, qui de naissance obscure
Dois mon sceptre à moi-même et rien à la nature,
N’ai-je pas lieu de croire en cet illustre rang
Le mérite dans l’homme et non pas dans le sang,
D’avoir à qui l’accroît fait part de ma puissance,
Et choisi la personne et non pas la naissance ?
(À Valérie.)
Vous, cher fruit de mon lit, beau prix de ses exploits,
Si ce front n’est menteur, vous approuvez mon choix,
Et tout ce que l’amour imprime d’allégresse
Sur le front d’une fille amante, mais princesse,
Y fait voir sagement que mon élection
Se trouve un digne objet de votre passion.

VALÉRIE.

Ce choix étant si rare, et venant de mon père,
Mon goût seroit mauvais s’il s’y trouvoit contraire.
Oui, seigneur, je l’approuve, et bénis le destin,
D’un heureux accident que j’ai craint ce matin.
(Se tournant vers Camille.)
Mon songe est expliqué : j’épouse en ce grand homme
Un Berger, il est vrai, mais qui commande à Rome.
Le songe m’effrayoit, et j’en chéris l’effet ;
Et ce qui fut ma peur est enfin mon souhait.

MAXIMIN, lui baisant la main.

Ô favorable arrêt, qui me comble de gloire,
Et fait de ma prison ma plus belle victoire !