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Que confus de ce crime, il ne se le reproche :

À quel point d'insolence, et d'indiscrétion, [485]

Ma jeunesse, d'abord, porta ma passion ;

Il est vrai, qu'ébloui de ces yeux adorables,

Que font tant de captifs, et de tant de misérables ;

Forcé par leurs attraits, si dignes de mes voeux,

Je les contemplai seuls, et ne recherchai qu'eux ; [490]

Mon respect s'oublia, dedans cette poursuite,

Mais un amour enfant, put manquer de conduite,

Il portait son excuse, en son aveuglement,

Et c'est trop le punir, que de bannissement ;

Sitôt que le respect, m'a déscillé la vue, [495]

Et qu'outre les attraits, dont vous êtes pourvue,

Votre soin, votre rang, vos illustres aïeux,

Et vos rares vertus, m'ont arrêté les yeux.

De mes voeux, aussitôt, réprimant l'insolence,

J'ai réduit sous vos lois, toute leur violence, [500]

Et restreinte à l'espoir de notre hymen futur,

Ma flamme a consommé, ce qu'elle avait d'impur ;

Le flambeau qui me guide, et l'ardeur qui me presse,

Cherche en vous une épouse, et non une maîtresse ;

Accordez-la, Madame, au repentir profond, [505]

Que détestant mon crime, à vos pieds me confond ;

Sous cette qualité, souffrez que je vous aime.

Et privez-moi du jour, plutôt que de vous-même ;

Car, enfin, si l'on pêche, adorant vos appas,

Et si l'on vous plaît, qu'en ne vous aimant pas ; [510]

Cette offense est un mal, que je veux toujours faire,

Et je consens plutôt, à mourir qu'à vous plaire.

CASSANDRE

Et mon mérite, Prince, et ma condition,

Sont d'indignes objets de votre passion ;