Votre parole enfin m'est suspecte aussi; [500]
Ma mère pourrait bien ce que mon frère a fait.
Soupçonnez votre mère ; oui, j'approuve qu'en elle
Vous redoutiez d'avoir une garde infidèle :
De cet indigne faix ne déchargez ce bras
Qu'après qu'en ma faveur le roi l'aura mis bas. [505]
Le roi ? Quoi ! Le perfide exige encore ce titre
Durant ce différend dont le sort est arbitre ?
Vous et sa trahison l'avez donc couronné ?
Bientôt, bientôt les dieux en auront ordonné.
Hélas ! Qu'en la fureur dont votre âme est pressée [510]
Vous venez tout d'un sens contraire à ma pensée !
Je ne viens pas ici pour aigrir vos débats ;
Je lui donne ce titre et ne vous l'ôte pas.
À Étéocle.
Pour vous la pitié peut-être a plus de charmes :
Approchez, Étéocle, et mettez bas les armes ; [515]
Cachez à mes regards leur flamboyant acier :
Vous les fîtes lever, posez-les le premier.
Il met son épée à terre.
Vous vous craignez l'un l'autre, et moi tous deux ensemble ;
Mais tous deux pour tous deux c'est pour vous que je tremble.
À Polynice.
Mais votre défiance à la fin doit cesser. [520]
Le voilà désarmé, puis-je vous embrasser ?
Faites ici, mes pleurs, l'office de ma langue.
Mes sanglots, mes soupirs, commencez ma harangue.