au pied des murs de Thèbes}}
Polynice, avancez, portez ici la vue ;
Souffrez qu'après un an votre sœur vous salue.
Malheureuse, eh ! Pourquoi ne le puis-je autrement ?
Quel destin entre nous met cet éloignement ? [345]
Après un si long temps la sœur revoit son frère,
Et ne lui peut donner le salut ordinaire ;
Un seul embrassement ne vous est pas permis ;
Nous parlons séparés comme deux ennemis :
Eh ! Mon frère, à quoi bon cet appareil de guerre ? [350]
À quoi ces pavillons sur votre propre terre ?
Contre quel ennemi vous êtes-vous armé ?
Ne trembleriez-vous pas si je l'avais nommé ?
Accordez quelque chose à la loi naturelle :
Le soleil s'est caché pour semblable querelle. [355]
Vous vous plaignez, armez et frappez à la fois :
Est-ce de la façon qu'on demande ses droits ?
Était-il d'un bon frère et d'un prince modeste
De paraître d'abord en cet état funeste,
Et de fouler aux pieds, sur un simple refus, [360]
Tout respect de nature et ne l'écouter plus ?
Mon frère, au nom des dieux protecteurs de la Grèce,
Car vers eux maintenant votre zèle s'adresse,
Et vous n'en gardez plus pour les dieux des Thébains ;
Au nom d'Argie encore, que j'aime et que le plains, [365]
Voyant qu'on lui prépare un si proche veuvage :
Au nom d'Adraste enfin domptez ce grand courage ;