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Je ne dois expliquer son amour ni sa haine,

Elle peut m'ordonner, ou le prix, ou la peine,

Qu'elle rende mes vœux, ou vains, ou satisfaits,

Elle ne peut faillir, et ne faillit jamais ;

Hélas, m'est elle due ? Et la crois-tu coupable,

Quand elle m'ôte un bien, dont je suis incapable ?

Les Dieux, qui de leur être ont formé ses appas,

Donnent souvent des biens, et ne les laissent pas.

Je ne l'appelle point ingrate, ni parjure,

Je l'acquis sans mérite, et la perds sans injure.

ÉRANTE

.

Dieux ! Qui ne priserait ces reflets infinis

Que loin de vous, Monsieur, tous soupçons soient bannis,

Aimez-la seulement, autant qu'elle vous aime,

Je viens pour vous tirer de cette peine extrême,

Je plains votre douleur, et connais qu'en effet,

Je traversais jadis un amant trop parfait.

Cet agréable objet dont ma sœur est atteinte

Est fille comme nous, et leur flamme une feinte.

Elles ont proposé ce divertissement,

Pour éprouver l'ardeur d'un si fidèle amant.

LISIDAN

.

Ranime cher ami, ta première espérance,

Et te repose en moi d'une ferme assurance,

Elle t'aime toujours, mais écoute comment

J'appris, ce qu'elle a cru tramer secrètement ;

Éraste qui brûlait d'une si vive flamme,

Nous suivant en ses lieux, pour te ravir ta Dame,

A rencontré l'objet de son premier tourment,

Qu'il a bien reconnu sous ce faux vêtement,

Il lui baise les mains, l'honore, la caresse,