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Vous me verriez pour vous brûler de feux égaux,

Si vos yeux, les premiers n'avaient causé mes maux ;

Mais la nécessité d'adorer Amélie,

Avait mis en ses mains le beau nœud qui me lie ;

Charmante, et chère sœur, obligez deux amants,

Dont vous tenez en main l'espoir, et les tourments.

AMÉLIE

.

Ainsi jamais amour ne te soit importune,

Et le ciel à tes vœux, égale ta fortune.

ÉRANTE

.

Dieux ! Que je suis sensible aux traits de la pitié !

Et que je vous chéris d'une aveugle amitié !

Partez, vivez contents, je force ma colère,

Et mon ressentiment cède à votre prière ;

Mais vous aurez Monsieur, moins de présomption,

Que de vanter jamais mon inclination,

Lisidan m'a vu feindre avec fort peu de crainte,

Il sait quelle raison m'ordonnait cette feinte.

LISIDAN

.

Je n'en suis pas trop sûr, et vous feignez si bien

Qu'il m'était mal aisé de n'appréhender rien,

Je crois qu'à mon sujet vous souffrez peu de chose,

Vous ne mourez jamais du mal, que je vous cause.

ÉRANTE

.

Tu te pourrais passer d'irriter mon amour,

Tu sais que ton objet m'est plus cher que le jour ;

Mais pour t'en faire voir un dernier témoignage,

Je veux suivre tes pas, j'entreprends le voyage ;

M'y souffrirez-vous pas ?