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Il rompt tous mes desseins, et sa sévérité

Tient (oui je le dirai) de l'inhumanité

Il met toute sa joie à traverser la mienne

Il souffre seulement qu'Éraste m'entretienne

Éraste qui me rend des devoirs superflus

Et qu'entre les humains je déteste le plus !

Dure nécessité que la crainte des pères !

Que la nature oblige à des règles sévères !

Qu'une fille languit sous de fâcheuses lois !

Et que pour un seul être on nous l'ôte de fois !

Mais que doit observer une fille amoureuse ?

En moi l'amour rencontre une âme généreuse,

Mon sexe, mon respect, ni ma condition

Ne me feront jamais trahir ma passion :

Un vainqueur si puissant à mon âme asservie,

Qu'il faut qu'on me le donne, ou qu'on m'ôte la vie.

DORISE

.

Donc il vous aime aussi ?

AMÉLIE

.

Si ses vœux ne sont faux,

Et si comme son corps son âme est sans défauts

Je n'ose toutefois confesser que je l'aime,

Alors qu'il m'entretient de son amour extrême ;

La constance est si rare, et l'artifice est tel

Qu'on ne peut s'assurer en l'esprit d'un mortel :

Souvent la trahison se masque d'apparences

Qui forcent nos froideurs et nos indifférences

Puis, tel nous tient, enfin, que nous ne tenons plus,

Et l'ayant accepté nous souffrons ses refus.

DORISE

.

Croyez-vous DIONYS capable de ce vice.

AMÉLIE

.