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les hommes, nonobstant que bien au long ci-apres au seiziesme chapitre je declare quelle est celle des Toüoupinambaoults sauvages Ameriquains, selon que je l’ay peu comprendre : toutesfois d’autant que, comme il sera là veu, je commence ce propos par une difficulté dont je ne me puis moy-mesme assez esmerveiller, tant s’en faut que je la puisse si entierement resoudre qu’on pourroit bien desirer, dés maintenant je ne lairray d’en toucher quelque chose en passant. Je diray donc qu’encores que ceux qui ont le mieux parlé selon le sens commun, ayent non seulement dit, mais aussi cogneu, qu’estre homme et avoir ce sentiment, qu’il faut donc dependre d’un plus grand que soy, voire que toutes creatures sont choses tellement conjointes l’une avec l’autre, que quelques differens qui se soyent trouvez en la maniere de servir à Dieu, cela n’a peu renverser ce fondement, Que l’homme naturellement doit avoir quelque religion vraye ou fausse, si est-ce neantmoins qu’apres que d’un bon sens rassis ils en ont ainsi jugé, qu’ils n’ont pas aussi dissimulé, quand il est question de comprendre à bon escient à quoy se renge plus volontiers le naturel de l’homme, en ce devoir de religion, qu’on apperçoit volontiers estre vray ce que le Poete Latin a dit, assavoir :


Que l’appetit bouillant en l’homme
Est son principal Dieu en somme.


Ainsi pour appliquer et faire cognoistre par exemple ces deux tesmoignages en nos sauvages Ameriquains, il est certain en premier lieu, que nonobstant ce qui leur est de particulier, il ne se peut nier qu’eux estans hommes naturels, n’ayent aussi ceste disposition