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de grande consideration, en ces racines d’Aypi et de Maniot de nostre terre du Bresil, gist en la multiplication d’icelles. Car comme ainsi soit que les branches soyent presque aussi tendres et aisées à rompre que chenevotes, si est-ce neantmoins qu’autant qu’on en peut rompre et ficher le plus avant qu’on peut dans terre, sans autrement les cultiver, autant a-on de grosses racines au bout de deux ou trois mois.

Outre plus, les femmes de ce pays-là fichant aussi en terre un baston pointu, plantent encor en ceste sorte de ces deux especes de gros mil, assavoir blanc et rouge, que vulgairement on appelle en France bled sarrazin (les sauvages le nomment avati), duquel semblablement elles font de la farine, laquelle se cuict et mange à la maniere que j’ay dit ci dessus que fait celle de racines. Et croy (contre toutesfois ce que j’avois dit en la premiere edition de ceste histoire, où je distingois deux choses, lesquelles neantmoins quand j’y ay bien pensé ne sont qu’une) que cest avati de nos Ameriquains est ce que l’historien Indois appelle maiz, lequel selon qu’il recite sert aussi de bled aux Indiens du Peru : car voici la description qu’il en fait.

La canne de maiz, dit-il, croist de la hauteur d’un homme et plus : est assez grosse, et jette ses fueilles comme celles des cannes de marets, l’espic est comme une pomme de pin sauvage, le grain gros et n’est ni rond ni quarré, ni si long que nostre grain : il se meurit en trois ou quatre mois, voire aux pays arrousez de ruisseaux en un mois et demi. Pour un grain il en rend 100. 200. 300. 400. 500. et s’en est trouvé qui a multiplié jusques à 600 : qui demonstre aussi la fertilité de ceste terre possedée maintenant des Espagnols. Comme aussi un autre a escrit qu’en quelques endroits