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gneurs alsaciens à diverses époques du moyen âge ; mais il n’en est pas resté dans le langage de traces appréciables ; ou tout au plus un seul nom de famille, et peut-être une demi-douzaine de termes relatifs à la bûcheronnerie et à la marquairerie, que ces rares immigrants y venaient pratiquer.

ANCIENNETÉ ET ÉTAT DE CONSERVATION

Sans nul doute le patois actuel est foncièrement le même langage que celui des premiers habitants du pays. Mais dans quelle mesure s’est-il modifié durant cet intervalle de dix siècles ?

N’ayant pas la protection que l’écriture apporte aux mots d’une langue littéraire, ceux des langues populaires subissent beaucoup plus vite la contraction de leurs membres, l'usure de leurs angles, l’effacement de leurs aspérités et de leurs reliefs. Le bressau n’a pas pu échapper à la loi commune ; mais il y a mieux résisté que la plupart des autres patois. On peut croire que depuis un temps immémorial il était fixé et comme pétrifié dans les formes où nous l’avons saisi et photographié avant la mort prochaine qui le menace. Par une confrontation de détail avec le vieux français, prononcé comme il devait l’être plutôt que comme il est souvent écrit, on voit que notre patois s’est arrêté à peu près au même degré de condensation et d’usure.

Ce que nous disons de la forme des mots est également vrai de la grammaire en général, et de la syntaxe en particulier. Partout où il est en divergence grammaticale avec le français moderne, il se retrouve d’accord avec l’ancien et tous les autres patois.

Mais à travers cette constance de ses formes essentielles,