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de le conclure du fait que tous les noms de lieux où l’x se rencontrait autrefois et se rencontre encore aujourd’hui, ont conservé cette prononciation en patois ; et cela nous paraissait d’autant plus acceptable que le bressau, non plus que le bourguignon, ne fait jamais entendre le son de l’x proprement dit. Mais les amateurs les plus compétents nous ont tous fait observer que le lecteur français aurait trop de peine à changer constamment une articulation à laquelle il est habitué, en une autre qui lui est si antipathique ; et que ce serait pour tout le monde une pierre d’achoppement.

D’un autre côté, nous ne pouvions pas songer au χ grec, tout à fait étranger à nos alphabets latins ; nous ne pouvions pas songer davantage au ch latin ou allemand, même avec le c’ marqué d’une apostrophe (c’h) comme en breton, à cause de l’emploi essentiel dont il est déjà pourvu ; mais il nous restait son strict équivalent kh, avec l’unique et minime inconvénient de n’avoir pas encore été usité autour de nous, ou d’avoir l’apparence d’une nouveauté. Sans doute un signe graphiquement simple comme le χ grec, le Х russe, l’xj espagnol, vaudrait encore mieux à tous les points de vue ; mais ce qui justifie le signe composé ch, kh, ce qui explique le choix qui en a été fait par tant de langues différentes, c’est que le c dur, k, venant se placer immédiatement devant l’aspiration gutturale, détermine une position de l’organe vocal qui la renvoie forcément au centre du palais, et la transforme ainsi en palatale. Et en effet, les personnes qui ne peuvent émettre cette articulation, suppriment par instinct le souffle caractéristique et se bornent au k. C’est ainsi qu’on prononce Zurik’ pour Zurich, Munik’ pour Munich, Kérès’ pour Xeres, Kédive pour Khédive, Tat-Ké pour Tat-Khé, etc. Cela suffit, ce nous semble, pour obtenir l’approbation de quiconque ne se refuse pas à entendre raison.