Page:Jean Hingre - Monographie du patois de La Bresse (Vosges), 1887.pdf/24

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 24 —

Liquides ou moyennes l, m, n, r : 1o aspirées par h : hlêre—choisir ; Anhla—trisaïeul ; hmeûre—mettre en mouvement ; tóhmâ—tout jamais ; hniêe—troupe, nuée ; aihnóyé—agenouiller ; i pérhrâ—j’aimerai.

2o Liquides aspirées par kh :

Khlanda—répandre ; poukhla—cochonnet : khmiquè—flairer ; rèkhmèlè—ressemeler ; khnâquê—maigre, sec et mal porté ; dèkhneûquè—déprendre d’une affection matérielle et grossière ; poukhra—martin-pêcheur,

L’affection de l’idiome pour ces aspirations est si grande qu’il les substitue sans cesse, la gutturale à l’s douce, au g doux et au j, la palatale à l’s dure et à ch français : poûhon—poison, hnó—genou, hmê—jumeau, poukhon—poisson, khneille—chenille, etc. Partout où les autres langues préfixent à un mot commençant par une consonne la préposition ex ou ses abréviations e, s, le bressau change celle-ci en h ou en kh suivant les affinités physiologiques : en d’autres termes, là où les autres langues sifflent leurs consonnes le bressau les aspire.

Ce phénomène de l’aspiration des consonnes apparaît comme un vestige dans beaucoup d’autres langues. Ainsi l’allemand aspire quelquefois le t, mais au milieu des mots seulement : acht, hecht, richten, etc. ; le grec ancien aspirait l, n et th au commencement de quelques mots, par le palais seulement, et r des deux manières ; les langues slaves ont aussi quelque chose de semblable ; mais nous doutons qu’il existe beaucoup de langues montées sur un système aussi universel et aussi parfait[1].

  1. Le Rédacteur des « Patois lorrains » estime (p. xxx et suiv.) que l’aspiration palatale a dû être importée dans notre pays par une invasion germanique qui en aurait doublé la population. Mais comment alors ne coïncide-t-elle jamais dans les mots qui sont communs à nos patois et l’allemand ? Même observation pour le latin : pourquoi ne la mettons-nous jamais non plus où les Romains