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motif est tiré des degrés de l’inspiration. L’inspiration d’un prophète est soumise à celle d’un autre prophète. Autre motif de consolation encore : Notre Dieu est un Dieu de paix et non de discorde. Enfin, quatrième motif, c’est une loi générale, c’est un précepte universel : voilà, dit-il, ce que j’enseigne dans toutes nos saintes assemblées. Quoi de plus imposant que ces paroles !
C’est qu’à cette époque l’Église, c’était le ciel ; c’était l’Esprit-Saint qui dirigeait tout, qui faisait mouvoir les chefs de l’Église et qui leur donnait l’inspiration divine. Aujourd’hui nous n’avons conservé que les symboles et les signes extérieurs de ces dons précieux, aujourd’hui encore nous sommes deux ou trois qui parlons, et nous prenons la parole tour à tour ; et quand l’un se tait, l’autre commence, mais ce ne sont là que des signes qui rappellent de si grands dons ; voilà pourquoi, quand nous prenons la parole, le peuple répond : Que le Seigneur soit avec votre esprit. Cela prouve que l’on parlait ainsi autrefois, mais alors c’était non pas la sagesse humaine, mais l’Esprit qui était dans toutes les bouches ; il n’en est pas ainsi de nos jours ; et ici je parle aussi pour moi.
5. Mais l’Église ressemble aujourd’hui à une femme déchue de son ancienne splendeur, et n’a plus que des images de sa prospérité d’autrefois, elle montre les cassettes et les coffrets où étaient renfermées des richesses, mais elle a perdu les richesses elles-mêmes. C’est à cette femme que l’Église ressemble. Ce n’est point à cause des grâces que je parle ainsi, il n’y aurait rien d’étonnant si elle n’avait perdu que cela, mais elle a perdu encore la bonne conduite et la vertu. Autrefois la foule des veuves et la troupe des vierges servaient d’ornement à l’Église ; maintenant elle est déserte et vide, et elle n’a plus que des fantômes. Il y a encore aujourd’hui des veuves et des vierges, mais elles n’ont plus ces qualités qui doivent orner les femmes qui, se préparent à de tels combats. Le caractère auquel on reconnaît le mieux une vierge, c’est qu’elle ne s’occupe que de Dieu et n’est occupée qu’à le prier continuellement ; et l’on reconnaît une veuve, non pas à ce qu’elle ne désire point un mariage heureux, mais à d’autres signes, comme la charité, l’hospitalité, l’assiduité à la prière et à toutes les autres vertus que demande Paul dans sa lettre à Timothée.
Même parmi les femmes qui se sont soumises au mariage, on en peut trouver qui font preuve d’une grande vertu : cependant ce n’est pas cela seulement qu’on leur demande, mais le soin diligent et l’amour des pauvres ; en quoi brillaient d’un vif éclat les femmes d’autrefois, il n’en est pas ainsi de beaucoup de femmes de notre temps. Alors au lieu d’or, c’étaient les aumônes qui leur servaient d’ornements ; aujourd’hui elles s’en sont dépouillées, et elles sont couvertes de chaînes d’or forgées avec leurs péchés.
Dirai-je qu’un autre endroit encore n’a plus l’éclat d’autrefois ? Jadis tout le monde se réunissait, et l’on chantait en commun. Nous le faisons encore aujourd’hui, mais alors tous n’avaient qu’un seul esprit et qu’une seule âme ; aujourd’hui vous ne trouveriez pas même en une seule âme cette concorde et cet accord, mais partout la guerre sévit. Celui qui préside à l’assemblée, demande encore à tous le silence, comme à ceux qui entrent dans la maison de leur père, mais ce n’est là qu’un vain mot ; cela n’est jamais une réalité. Autrefois les maisons mêmes étaient des églises, aujourd’hui l’église même est une maison, elle est même pire que n’importe quelle maison. Car dans chaque maison vous remarquez un ordre bien établi : la maîtresse de la maison est assise sur un siège, entourée de chasteté, de modestie et d’honneur : autour d’elle les servantes filent en silence, et chaque serviteur s’occupe de la tâche qui lui est imposée.
Mais dans l’église il y a un grand tumulte, une grande confusion, et elle ne diffère en rien d’une auberge, tant sont forts les rires, tant est grand le désordre, ainsi que dans des bancs et dans un marché où tous crient et font du bruit. Et cela n’arrive qu’ici : car ailleurs il n’est pas permis, dans l’église, d’adresser la parole même à son voisin, même à un ami qu’on revoit après une longue absence ; tout cela doit se faire au-dehors, et avec raison. L’église, en effet, n’est pas une boutique de barbier ou de parfumeur, ou une de ces échoppes d’artisans qui sont au marché, c’est le séjour des anges, le séjour des archanges, le royaume de Dieu, le ciel lui-même. Si quelqu’un vous introduisait au ciel, lors même que vous verriez votre père ou votre frère, vous n’oseriez lui parler : ainsi dans l’église ne faut-il dire que des choses spirituelles, car c’est aussi le ciel. Si vous ne me