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Et il ne leur reste plus que de trouver ce jour qui vengera tous leurs crimes, et qui les punira avec une extrême rigueur ; puisque c’est là le partage de ceux qui finissent leur vie dans le péché. Il faut que ceux qui vivent de la sorte, désespèrent de leur salut, et qu’ils n’attendent plus que la punition de leurs crimes. Pour ceux qui ont encore du temps et de la vie, ils peuvent combattre et vaincre aisément leur ennemi, et mériter ainsi la couronne.
Ne vous laissez donc point abattre par la négligence, et ne perdez point courage. Ce qu’on vous commande n’est point pénible. Quelle peine y a-t-il à ne point jurer ? Faut-il pour cela dépenser beaucoup d’argent ? Faut-il y employer beaucoup de travail ? Il suffit de le vouloir, et tout ce qu’on vous commande sera accompli. Que si vous vous excusez sur votre mauvaise habitude, c’est par cela même que je vous veux faire voir qu’il vous est aisé de vous corriger. Car aussitôt que vous aurez pris une habitude contraire, vous aurez gagné ce que vous voulez. On en a vu autrefois parmi les païens qui, ayant une difficulté de langue, l’ont surmontée par leurs soins, et se sont corrigés de ce défaut : d’autres qui remuaient sans cesse les épaules d’une façon disgracieuse, se sont fait des violences pour perdre cette habitude, jusqu’à arrêter ce mouvement de leur corps par la pointe d’une épée nue.
Puisque l’Écriture ne vous persuade pas, je suis contraint de vous exciter par l’exemple de ces idolâtres. Dieu traitait ainsi les Juifs lorsqu’il leur disait : « Allez dans les îles de Céthim et envoyez dans le pays de Cédar, et voyez si ces peuples ont quitté leurs dieux, quoique certainement ils ne soient pas dieux. » (Jer. 2,10) Il renvoie même quelquefois l’homme à l’exemple des bêtes. Il dit aux paresseux : « Allez à la fourmi, allez à l’abeille et imitez leur activité et leur travail. » (Prov. 6, et 30) Je suis donc aujourd’hui cet exemple et je vous dis : Jetez les yeux sur ces philosophes païens et vous reconnaîtrez de quels supplices sont dignes ceux qui méprisent la loi de Dieu, puisque ceux-là, pour avoir l’extérieur un peu mieux réglé, ont enduré tant de maux, et que vous ne voulez rien faire de semblable pour gagner le ciel.
Que si après cela vous dites que la longue habitude est difficile à vaincre et qu’elle trompe souvent ceux qui se tiennent le plus sur leurs gardes, j’en demeure d’accord avec vous. Mais je vous dis en même temps, que comme elle peut aisément vous surprendre, vous pouvez aussi aisément la vaincre. Car si vous donnez ordre à quelqu’un de chez vous de vous avertir, comme à un domestique, à votre femme, à quelque ami, vous vous dégagerez bientôt de votre habitude. Si vous prenez cette peine seulement durant dix jours, il ne vous en faudra pas davantage, vous serez dans une paisible assurance et cette nouvelle habitude que vous contracterez, vous rendra fermes contre la mauvaise. Si, lorsque vous entreprendrez ainsi de vous corriger, vous tombez, une ou deux ou plusieurs fois, ne vous découragez pas. Relevez-vous aussitôt, revenez au combat avec ardeur et vous remporterez enfin la victoire.
Le parjure n’est pas un péché peu considérable, et si le simple jurement vient du mauvais, jugez de quels supplices le parjure sera puni. Vous applaudissez à ce que je dis, mais ce ne sont point ces applaudissements ni ces acclamations que je recherche. Tout mon désir est que vous écoutiez paisiblement et modestement ce que je vous prescris et que vous soyez fidèles à le pratiquer. Ce sont là les acclamations que je cherche, et les applaudissements que je désire. Que si vous vous contentez de louer ce que je dis sans le pratiquer, vous vous attirez un plus grand supplice et une condamnation plus sévère, et vous vous couvrez vous-mêmes de honte. Nous n’êtes pas ici au théâtre et vous ne vous y assemblez pas pour écouter des comédiens et leur applaudir. C’est ici une école toute sainte, et tout ce que vous avez à faire, c’est de mettre en pratique ce que vous entendez et de témoigner votre obéissance par vos actions. Ce sera alors que je me tiendrai bien récompensé de toutes mes peines. Mais maintenant je vous avoue que je suis presque réduit au désespoir. Quoique je ne cesse point de vous instruire et en particulier et en public, le n’en remarque aucun fruit et vous êtes encore comme aux premiers éléments de la vie spirituelle, ce qui abat sans doute et qui décourage beaucoup un pasteur. Considérez que saint Paul même témoigne une extrême peine de voir des chrétiens toujours dans la bassesse des premières instructions : « Au lieu que depuis le temps qu’on « vous instruit », dit-il aux Hébreux, « vous devriez déjà être maîtres, vous avez besoin « encore qu’on vous apprenne les rudiments