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acte d’autorité. Or ils conservent aujourd’hui encore le nom qu’il leur imposa, et Dieu l’a permis, afin de perpétuer le souvenir des faveurs dont il avait comblé l’homme. Aussi, en voyant que dans le principe les animaux lui étaient soumis, ne pouvons-nous attribuer à une autre cause qu’à son péché l’affaiblissement et presque la ruine de ce souverain domaine.
Et Adam donna leurs noms aux animaux domestiques, aux oiseaux du ciel, et aux bêtes sauvages. Ces paroles nous apprennent, mon cher frère, combien grande était dans Adam la liberté de la volonté, et l’étendue de la science. Ainsi nous ne saurions dire qu’il ne connaissait pas le bien et le mal. Car n’était-il pas profondément instruit et savant celui qui put donner un nom propre et convenable aux animaux domestiques, aux oiseaux du ciel et aux bêtes sauvages, sans confondre les espèces, et sans imposer aux animaux domestiques des noms qui eussent convenus aux bêtes sauvages, ou à celles-ci des noms qui eussent convenu aux premiers ? Conjecturez de là quelle est la puissance de ce souffle de vie que le, Seigneur répandit dans l’homme, et quelle est la science de cette âme spirituelle qu’il lui donna. Et en effet, l’homme est un animal raisonnable, qui se compose de deux natures, d’une âme spirituelle, et d’un corps matériel. Or celui-ci est, par rapport à l’âme, comme un instrument entre les mains d’un excellent artiste. Mais en considérant l’excellence d’un être si parfait, admirez la sagesse du Créateur. Oui, si la beauté des cieux, quand on y réfléchit attentivement, nous porte à célébrer les louanges d’un Dieu créateur, combien plus encore l’étude de l’homme, doué de raison, comblé d’honneurs dès le premier instant de sa création, et enrichi des dons les plus merveilleux, ne doit-elle pas nous exciter à célébrer par de continuelles louanges l’Auteur de ces merveilles, et à rendre gloire à Dieu selon nos forces !
Je voudrais aborder l’explication des versets suivants, mais je crains d’avoir déjà, par ce long entretien, fatigué votre attention ; aussi vaut-il mieux ne pas le prolonger. Car l’important n’est pas que je vous dise beaucoup de choses, mais que vous reteniez ce que je vous dis ; il ne suffit même pas que vous sachiez pour vous seuls le sens des saintes Écritures ; mais il faut encore que vous puissiez le faire connaître à vos frères et le leur expliquer. Je vous engage donc à vous entretenir, au sortir de cette assemblée, du sujet que je viens de traiter, et à vous communiquer mutuellement vos souvenirs. Ce sera un excellent moyen de vous rappeler l’ensemble : et le détail de cet entretien, en sorte qu’arrivés dans vos maisons, vous pourrez en méditer la céleste doctrine. D’ailleurs, cette attention à écouter la parole divine, et cette application à la méditer, vous faciliteront les moyens de calmer le tumulte de vos passions, et d’éviter les embûches du démon.
Et en effet, quand cet esprit mauvais voit une âme tout occupée des choses de Dieu, et comme tout absorbée en de saintes pensées, il n’ose s’en approcher, et il s’en éloigne promptement. Car l’action de l’Esprit-Saint en cette âme est un feu qui le met en fuite. Appliquons-nous donc à ce pieux exercice, afin d’en retirer de si précieux avantages, de vaincre l’ennemi de notre salut, et de mériter des grâces plus abondantes. Par là tout nous succédera heureusement, les difficultés s’aplaniront, le mal lui-même se changera en bien, et les, malheurs de la vie présente ne pourront nous attrister. Car si nous nous occupons exclusivement des choses de Dieu, il prendra soin lui-même de notre existence. Sous sa conduite nous traverserons sans naufrage la mer orageuse de ce monde, et sa main nous dirigera heureusement vers le port du salut. C’est à lui seul qu’appartiennent la, gloire et l’empire, maintenant et toujours, et dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.