Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 5, 1865.djvu/85

Cette page n’a pas encore été corrigée

QUATORZIÈME HOMÉLIE.


« Et le Seigneur, Dieu prit l’homme qu’il avait formé, et le plaça dans le jardin de délices pour le cultiver et le garder. » (Gen. 2,15)

ANALYSE.

  • 1. Saint Chrysostome exhorte d’abord ses auditeurs à rechercher les divers sens profonds et mystérieux de l’Écriture en leur rappelant avec quelle ardeur les plongeurs se livrent à la pêche des perles. – 2. Puis il aborde l’explication de son texte, et observe que cette expression, le Seigneur Dieu ; n’indique point, entre le Père et le Fils, comme le pensaient certains hérétiques, quelque différence d’attribut ou de souveraineté. – 3. Il remarque ensuite que le travail fut imposé à l’homme comme un préservatif contre l’oisiveté, mais que ce travail n’était qu’une douce occupation, et non une pratique. – La défense que le Seigneur fit à Adam A manger du fruit de l’arbre de la science du bien et du mal, avait pour objet d’exercer son obéissance et de le tenir dans la dépendance et la soumission ; et quoique la femme ne fut pas encore créée, Dieu la comprit dans cette défense, afin qu’Adam la lui fît ensuite connaître. – 4. Au sujet de la création de la femme, l’orateur observe qu’ici, comme dans la création de l’homme, Dieu s’adresse à son Fils, et qu’il révèle la dignité de la femme en disant qu’elle fut formée pour être la compagne de l’homme. – 5. Il explique ensuite comment Adam nomma les divers animaux par un acte d’autorité, ainsi qu’un maître nomme ses serviteurs, et termine en priant ses auditeurs de garder le souvenir de ses instructions.


1. Aujourd’hui encore, si vous le trouvez bon, je reprendrai le sujet de notre dernier entretien, et je vous en développerai de nouveau la doctrine spirituelle : car le texte sacré, qui vient d’être lu, renferme de grands mystères, et il est nécessaire, pour en retirer quelque fruit, de les approfondir, et de les étudier avec attention, Les pécheurs qui s’occupent de la pêche des perles, ne les recueillent qu’au prix de grandes fatigues, et en bravant les flots et les abîmes de l’Océan ; mais combien plus devons-nous appliquer notre esprit à sonder les profondeurs des saintes Écritures, et à y chercher les véritables pierres précieuses. Toutefois, ne vous effrayez point, mon cher frère, lorsqu’on vous parle d’abîmes et de profondeurs : car il ne s’agit pas ici d’explorer une mer orageuse. La grâce de l’Esprit-Saint, qui nous dirige par ses divines clartés, facilite notre travail et nous le rend fructueux. Les pêcheurs de perles font rarement fortune, et souvent même cette pêche leur devient funeste et cause leur perte ; du moins le plaisir du succès n’en égale jamais les suites fâcheuses, puisque la vue de ce trésor excite contre eux les regards de la cupidité, et arme le bras de l’avarice. Et, en effet, la possession de quelques perles, loin de nous être véritablement utile, ne produit trop souvent que la discorde et la mort, car elle irrite l’avarice et enflamme la cupidité, en sorte qu’elle met en péril la vie même de celui qui a trouvé ce trésor.
Mais les pierres précieuses que renferment nos saintes Écritures ne nous offrent aucun danger semblable ; si leur prix est au-dessus de toute estimation, la joie de les posséder est inaltérable, et bien supérieure à toutes les joies humaines ; c’est ce que nous apprend le Psalmiste quand il s’écrie : Seigneur, vos paroles sont beaucoup plus désirables que l’or et les pierres précieuses. (Ps. 18,11) Mais s’il met ainsi la loi divine en regard des matières les plus estimées, il sait aussi l’apprécier bien au-dessus d’elles en disant que cette loi leur est de beaucoup supérieure : Seigneur, dit-il, vos paroles sont beaucoup plus désirables que l’or et les pierres précieuses. Certes, ce n’est point là, dans la pensée du Psalmiste, une comparaison de parfaite égalité ; mais parce que l’or et les pierreries sont parmi nous les objets les