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ONZIÈME HOMÉLIE.


Qu’il faut estimer la vertu, imiter les saints, qui, étant de même nature que nous, l’ont pratiquée excellemment : la négligence sera sans excuse.

ANALYSE


  • 1-2. Dans cette homélie, prononcée un des deux jours de la semaine où l’on ne jeûnait pas ; c’est-à-dire le samedi ou le dimanche, saint Chrysostome interrompt l’explication de la Genèse, et traité un sujet tout moral : l’estime de la vertu et l’imitation des saints. – 3-4. Il prouve à ses auditeurs que le jeûne et l’audition de la parole sainte ne sont utiles qu’autant qu’on y joint la pratique des vertus chrétiennes, et que l’essentiel est de dompter ses passions. – 5.— 6. Il leur propose ensuite l’exemple de saint Paul qui, quoique recommandable par tant de vertus, ne laissait pas que de se rendre chaque jour plus parfait. – 7. Et il termine en les exhortant à se rendre, comme l’Apôtre, des temples dignes de recevoir l’Esprit-Saint.


1. Je vous ai entretenus, ces jours derniers, de matières profondes qui ont peut-être fatigué votre esprit et votre attention ; c’est pourquoi je veux aujourd’hui traiter un sujet plus facile, car, si le corps abattu par le jeûne, a besoin de quelque soulagement, pour reprendre avec une nouvelle ardeur cet exercice de pénitence, l’âme réclame elle-même quelque relâche et quelque repos. Sans doute il ne s’agit point ici de tenir toujours l’esprit bandé ou toujours relâché, mais de savoir tour à tour le distraire et le rendre attentif ; c’est le véritable moyen de conserver les forces de l’âme et de réprimer les révoltes de la chair : car un travail trop assidu engendre l’ennui et le dégoût, et un repos trop prolongé conduit à la paresse ; l’expérience nous le dit assez, et pour l’âme et pour le corps, en sorte qu’il faut de la modération en toutes choses.
Tel est encore l’enseignement que Dieu nous donne parles créatures qu’il a faites pour notre usage : ainsi, pour rie parler que du jour et de la nuit, c’est-à-dire de la lumière et des ténèbres, il a destiné les jours au travail de l’homme, et la nuit à son repos ; aussi a-t-il fixé à l’un et à l’autre, des bornes et des limites qui nous en doublent l’utilité ; et d’abord, le jour est le temps du travail, le Psalmiste nous le dit : l’homme sort alors pour faire son ouvrage et travailler jusqu’au soir. (Ps. 103,23) C’est avec raison qu’il dit : jusqu’au soir, car les ténèbres qui surviennent, assoupissent l’homme, et font succéder le repos au travail ; alors, en effet, la nuit, comme une tendre nourrice, calme l’activité de nos sens, et elle verse sur nos membres fatigués le repos et le sommeil ; mais, dès que les heures de la nuit se sont écoulées, les premiers rayons du jour réveillent l’homme ; ses sens, qui ont repris une vigueur nouvelle, se raniment aux clartés du soleil, et lui-même reprend ses travaux accoutumés avec plus d’ardeur et de facilité. Nous observons la même sagesse dans le cours périodique des saisons le printemps succède à l’hiver et l’automne à l’été, et ce changement de saison et de température est pour nos corps un véritable repos. Un froid trop intense les gèlerait, et les chaleurs trop excessives les énerveraient ; mais l’automne nous dispose insensiblement à l’hiver et le printemps à l’été.
J’ajoute même que l’homme sensé et judicieux qui étudiera la nature à ce point de vue, y découvrira aisément un ordre admirable ; aussi avouera-t-il que rien dans la création n’a été fait sans raison et au hasard. Les plantes que produit la terre nous en offrent un bel exemple, car la terre ne les enfante pas toutes à une époque unique, de même que tous les temps ne sont pas propres à la culture ; mais le laboureur connaît les diverses saisons que la