Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 5, 1865.djvu/65

Cette page n’a pas encore été corrigée

ici avec quel soin l’écrivain sacré répète deux fois le même fait afin de mieux le graver dans la mémoire de ses lecteurs. Si telle n’eût pas été son intention, il se fût contenté de dire : et Dieu créa l’homme. Mais il ajoute  : il le créa à son image. Précédemment il nous avait expliqué le sens de ce mot image, et ici il le répète à dessein, et il nous dit : et Dieu le créa à son image. Il a voulu aussi ne laisser aucun prétexte d’excuse à ceux qui attaquent les dogmes de l’Église ; c’est pourquoi il a expliqué plus haut le sens de ce mot image, qu’il entend de l’empire que l’homme devait exercer sur tous les animaux. Mais poursuivons le récit de la Genèse. Et Dieu créa l’homme ; il le créa à l’image de Dieu ; il les créa mâle et femelle. Ce qu’il n’avait qu’insinué précédemment, en disant au pluriel : qu’ils dominent, Moïse l’annonce ici plus clairement, et néanmoins encore sous le voile du mystère, car il n’a point parlé de la formation de la femme, et il n’a pas indiqué d’où elle a été tirée. Il se contente donc de dire : et Dieu les créa mâle et femelle.
La femme n’a pas encore été formée, et déjà Moïse en parle comme d’un fait accompli. Tel est le privilège de la vision spirituelle ; et les yeux du corps ont moins de force pour saisir les objets sensibles, que ceux de l’âme pour fixer les personnes et les faits qui n’existent pas encore. Après avoir dit que Dieu les créa mâle et femelle, Moïse rapporte en ces termes la bénédiction commune que Dieu leur donna Et le Seigneur, dit-il, les bénit, disant : croissez et multipliez ; remplissez la terre, et vous l’assujettissez, et, dominez sur les poissons de la mer. Quelle éminente bénédiction ! Cet ordre : croissez, multipliez et remplissez la terre avait été intimé, il est vrai, aux animaux et aux reptiles ; mais il n’a été dit qu’à l’homme et à la femme commandez et dominez. Admirez donc la bonté du Seigneur ! La femme n’existe pas encore, et il la fait entrer en participation de l’autorité de l’homme, et des privilèges de la bénédiction divine. Dominez, leur dit-il, sur les poissons de la mer, et sur les oiseaux du ciel, et sur tous les animaux, et sur toute la terre, et sur tous les reptiles qui se meuvent sur la terre.
5. Mais qui pourrait mesurer l’étendue de ce pouvoir, et apprécier la grandeur de cet empire ! Eh ! ne voyez-vous pas que toute la création a été soumise au sceptre de l’homme ? Ainsi vous ne devez avoir de cet animal raisonnable aucune idée petite et médiocre. Car ses honneurs sont grands, la bonté du Seigneur à son égard est immense, et ses bienfaits aussi étonnants qu’ineffables. Et Dieu dit : voilà que je vous ai donné toutes les plantes répandues sur la surface de la terre, et qui portent leurs semences, et tous les arbres fruitiers qui ont leur germe en eux-mêmes, pour servir à votre nourriture. Et il fut fait ainsi. (Gen. 29,30) Considérez, mes chers frères, la souveraine bonté du Seigneur, pesez attentivement les paroles de l’Écriture, et n’en perdez pas une syllabe. Et Dieu dit : voilà que je vous ai donné toutes les plantes. Il continue ainsi à s’adresser à l’homme et à la femme, quoique celle-ci n’eût pas encore été formée. Admirez également l’excellence de cette bonté qui se montre éminemment libérale et généreuse non seulement envers l’homme, et envers la femme qui n’existait pas, mais aussi envers tous les animaux. Car après avoir dit : Voilà que je vous ai donné les plantes de la terre pour servir à votre nourriture, le Seigneur ajoute : et à celle de tous les animaux de la terre. Ici se déclare un autre abîme de bonté, puisque le même Dieu qui pourvoit aux besoins des animaux qui servent à nos besoins, à nos travaux, et à notre nourriture, n’en exclut point les animaux sauvages et féroces.
Eh ! qui parlerait dignement de cette infinie bonté ! Voilà, dit le Seigneur, que toutes les plantes serviront à votre nourriture, et à celle de tous les animaux de la terre, de tous les oiseaux du ciel, et de tous les reptiles qui rampent sur la terre, et de tout ce qui est vivant et animé. (Gen. 1,30) Ces paroles nous montrent la paternelle providence du Seigneur à l’égard de l’homme qu’il vient de créer. Car après l’avoir créé, il lui donne un empire souverain sur tous les animaux, et de peur qu’il ne s’effraie à la vue d’une si grande multitude qu’il lui faudrait nourrir, il prévient jusqu’à la pensée de cette inquiétude, et lui déclare qu’il a ordonné à la terre de pourvoir, par sa fertilité, à sa nourriture et à celle de tous les animaux. Voilà donc, dit-il, que les plantes serviront à votre nourriture, et à celle de tous les animaux de la terre, et des oiseaux du ciel, et des reptiles qui rampent sur la terre, et de tout ce qui est vivant et animé. Et il fut fait ainsi. Or tous les commandements du Seigneur furent immédiatement exécutés, et toutes les créatures se trouvèrent disposées dans le rang et l’ordre qui leur avaient été assignés. C’est