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que le jeûne nous en facilite les moyens. Ces dispositions nous permettront de prier avec plus de recueillement, et d’obtenir par la confession de nos péchés des grâces plus abondantes. D’ailleurs le Seigneur nous a révélé lui-même combien ces âmes lui sont agréables. Sur qui fixerai-je mes regards, nous dit-il, si ce n’est sur l’homme humble, pacifique et obéissant à ma parole ? (Is. 66,2) C’est pourquoi Jésus-Christ, nous dit également Apprenez de moi que je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez le repos de vos âmes. (Mt. 2,29) Et en effet, le chrétien sincèrement humble ne saurait s’abandonner à la colère, ni à la vengeance, parce qu’il ne s’occupe que de la considération de son néant et de sa misère. Mais qui est plus heureux que ce chrétien ? il est dans le port à l’abri de la tempête, et il se complaît en son repos et sa sécurité. Aussi Jésus-Christ nous assure-t-il que c’est le moyen de trouver le repos de nos âmes.
Le chrétien qui réprime les saillies de ses passions, jouit donc d’une paix abondante ; mais celui qui est lâche et négligent, et qui ne sait point les modérer, vit nécessairement dans le trouble et l’agitation. Sa conscience est le théâtre d’une guerre intestine, et il se trouble en présence de lui-même. Son cœur devient le jouet des orages, qui y soulèvent les vagues d’une mer féconde en naufrages. Et quand les esprits mauvais y déchaînent les tempêtes, trop souvent, par l’inhabileté du pilote, le vaisseau périt corps et biens. Ainsi c’est pour nous un devoir d’être attentifs et vigilants, afin de ne perdre jamais de vue le soin et la préoccupation de notre salut. Car tout chrétien doit lutter sans cesse contre les révoltes de la chair, et garder fidèlement les préceptes de la loi divine. Il doit s’en environner comme d’un rempart, et ne point abuser de la miséricordieuse bonté du Seigneur. Mais surtout il ne doit point attendre pour s’humilier que sa colère éclate, car l’on pourrait dire de lui comme des Juifs : Lorsque le Seigneur les frappait, ils revenaient à lui. (Ps. 77,34)
Et puisque ces jours de jeûne sont pour nous des jours de salut, hâtons-nous, mes bien-aimés, de confesser nos péchés ; évitons toute action mauvaise, et exerçons-nous à la pratique de toutes les vertus. C’est le conseil du Psalmiste : Éloignez-vous du mal, nous dit-il, et faites-le bien. (Ps. 36,27) Si notre conduite se règle sur ces maximes, et si nous joignons la fuite du vice à la privation des viandes, nous jouirons d’une confiante sécurité, et nous obtiendrons pour la vie présente les grâces les plus abondantes. Bien plus, les prières et l’intercession des saints, qui sont les amis de Dieu, nous mériteront les effets de sa miséricorde au jour terrible du jugement. Qu’il en soit ainsi, par la grâce et la bonté de Notre-Seigneur Jésus-Christ, à qui soient, avec le Père et l’Esprit-Saint, la gloire, l’honneur et l’empire, maintenant, toujours, et dans tous les siècles des siècles. Ainsi soit-il.