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leurs homicides. Maintenant il invoque Dieu au secours des opprimés. Tel est le cœur des saints. Ils ne songent pas seulement à eux-mêmes : comme si le monde entier n’était qu’une maison, et le genre humain qu’une seule personne, ils ne cessent d’invoquer Dieu pour tous. « Levez-vous, Seigneur, que l’homme ne se fortifie pas. » Qu’est-ce à dire : « Levez-vous, Seigneur ? » Vengez, secourez, punissez les persécuteurs. La simplicité des expressions est remarquable ici : « Levez-vous, que l’homme ne se fortifie pas. » C’est pour indiquer le peu que nous sommes, créatures de boue, cendre et poussière. » Que les nations soient jugées « en votre présence. » C’est-à-dire qu’elles soient punies de leurs péchés. La longanimité ne les a point corrigées : demandez-leur compte de leurs iniquités. « Établissez, Seigneur, un juge sur eux ; que les nations connaissent qu’ils sont hommes. » « Chant prolongé. » Suivant un autre : « Toujours. » Qu’est-ce à dire : « Établissez un juge sur eux ? » Puisqu’ils agissent comme des hommes sans loi, qu’ils ne veulent pas expier, punissez-les, châtiez-les désormais au lieu de les avertir. C’est ce qu’un autre exprime en disant : Mettez, Seigneur, un sujet d’effroi parmi eux. Considérez comment ce n’est pas leur punition qu’il cherche, mais leur correction, leur amendement, la fin de leurs iniquités. Ils seront châtiés, dit le Psalmiste, au lieu d’être avertis ; ce n’est pas seulement dans leur intérêt, c’est encore pour les autres. Et pour que vous entendiez quel avantage et quel remède il en résulte, écoutez la suite : « Que les nations connaissent qu’ils sont hommes. » Le sens est celui-ci. Beaucoup d’hommes perdent jusqu’à la conscience de leur nature, tombent dans le délire, se méconnaissent eux-mêmes. Et c’est bien à propos qu’il ajoute : « Toujours », afin de montrer que ce n’est pas seulement dans les infortunes, mais encore, dans les prospérités. Riais si vous les châtiez maintenant, en proie à de vives alarmes, et pleins du souvenir de leur peine, ils conserveront désormais la conscience de leur nature jusqu’au sein de la prospérité.
9. Voyez-vous comment il prie pour eux, pour la guérison de leur folie ? En effet, s’ignorer soi-même, c’est la pire des folies, et des frénésies. Ce dernier mal ne provient que de la nécessité : mais l’autre est le fait d’une volonté corrompue. « Pourquoi, Seigneur, vous êtes-vous retiré au loin, et me négligez-vous dans le temps de mon besoin et de mon affliction ? » Ainsi parle le Prophète il supplie Dieu et l’invoque au nom des affligés ; ce n’est pas un reproche, à Dieu ne plaise ! Beaucoup d’affligés demandent le jugement avant que l’heure en soit arrivée c’est ainsi que ceux qu’on ampute, avant que l’opération soit terminée, conjurent le médecin de retirer le fer : prière que leur arrache, contre leur intérêt, l’impossibilité d’endurer plus longtemps leurs souffrances. Souvent on les entend crier au médecin : vous me torturez, vous me tuez, vous me faites mourir. Mais ce n’est pas l’intelligence qui parle ainsi, c’est la douleur. Ainsi parlent dans les afflictions beaucoup d’hommes pusillanimes, incapables de supporter la douleur. Sophonias touche ce point quelque part. Mais c’est dans le. Nouveau Testament, et alors les épreuves étaient modérées : la sagesse est encore loin de ce qu’elle devait être dans le Nouveau. « Tandis que l’impie s’enfle d’orgueil, le pauvre se consume ; ils sont trompés dans les pensées dont leur esprit est occupé (qu’ils soient trompés, suivant un autre). Car le pécheur est loué dans « les désirs de son âme et le méchant est béni. Le pécheur a irrité le Seigneur. » Le Prophète qui a pris la posture d’un suppliant, qui prie Dieu pour les opprimés, indique aussi les souffrances causées par la faiblesse humaine : jusqu’au châtiment, jusqu’au supplice, l’opprimé souffre, ne pouvant se résigner au bonheur du méchant. Et ceci même est un douloureux supplice. Il demande donc que les méchants soient punis, que leurs complots se retournent contre eux et il fait mention d’une intolérable espèce de vice : « Le pécheur est loué dans les désirs de son âme. » Des choses dont on devrait rougir, devant lesquelles il faudrait se voiler la face, leur attirent des éloges, de l’admiration. Et quel moyen de guérison reste-t-il désormais, dès que le vice est comblé de louanges ? Nous voyons la même chose autour de nous. On vante l’une à cause de sa puissance ; un aulne à cause de la vengeance qu’il tire de ses ennemis ; un autre pour l’habileté avec laquelle il sait s’enrichir aux dépens de tout le monde. Quand il se perd, on dit qu’il s’y retrouve. Les éloges ne manquent à aucun talent de ce genre : mais des qualités spirituelles, il n’eu est pas question. Nulle part