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peuples vaincus : ils appellent leurs héros destructeurs de villes, vainqueurs des barbares, que sais-je encore ? C’est un hymne pareil que chante notre bienheureux. Il parle d’une victoire, d’un trophée, de guerres terminées, guerres d’un genre bien plus terrible. Et voyez comment il débute : « Seigneur, notre Seigneur. » De ceux qui ne croient pas en lui il n’est le Seigneur que d’une façon : mais il est doublement le nôtre ; et parce qu’il nous a tirés du néant, et parce que nous le reconnaissons pour ce qu’il est. Considérez aussi comment tout d’abord David rappelle en un mot la bienfaisance de Dieu à notre égard. Rappelez-vous comment Dieu est devenu voire Seigneur ; songez que des hommes séparés de lui, et morts, pour ainsi dire, ont été reconquis par sa grâce et ressuscités ; et alors vous comprendrez comment ce mot rappelle à lui seul la bienfaisance divine.
Dans l’étonnement que lui cause cette merveille, le Prophète s’écrie : « Que ton nom est admirable ! » Il veut dire ton nom est tout à fait admirable. Dans quelle mesure il est admirable, il ne l’a pas dit : il ne s’agit point ici de marquer une mesure, mais d’indiquer une grandeur qui dépasse l’imagination. Que dire maintenant de ceux qui prétendent scruter l’essence divine ? Si le nom seul de Dieu cause au Prophète un tel étonnement, qu’il demeure interdit, comment excuser ceux qui se vantent de connaître son essence ? le Prophète ne peut comprendre à quel point ce nom est admirable : « Que votre nom est admirable ! » Par ce seul nom, en effet, la mort fut vaincue, les démons furent enchaînés, les cieux rendus accessibles, les portes du paradis ouvertes ; l’Esprit fut envoyé ici-bas, les esclaves devinrent libres, les ennemis furent des fils ; les étrangers, des héritiers ; les hommes des anges. Des anges, ai-je dit ? Dieu est, devenu homme, et l’homme est devenu Dieu ; le ciel accueillit une espèce terrestre ; la terre reçut Celui qui siège au-dessus des chérubins avec l’armée des anges. La cloison fut enlevée, la barrière abattue, les choses divisées se réunirent, les ténèbres furent supprimées, la lumière brilla, la mort fut engloutie. – Ce sont toutes ces pensées et d’autres encore qui arrachent au Prophète ce cri : « Que votre nom est admirable sur toute la terre ! » Que penserons-nous maintenant des enfants des Juifs qui osent se refuser à la vérité ? Volontiers je leur demanderais de qui il est question dans ce passage. Du souverain Maître, répondront-ils, mais son nom n’était pas admirable sur toute la terre. Et c’est ce dont témoigne Isaïe en disant : « A cause de vous mon nom est blasphémé parmi les nations. » (Is. 52,5) Mais si ceux qui l’honoraient donnaient lieu à d’autres de le blasphémer, où donc était-il admirable ? Qu’il est admirable en vertu de sa nature, cela est clair : mais aux yeux des hommes d’alors, de la plupart au moins, loin d’être admirable, il était un objet de mépris. Il n’en est plus de même aujourd’hui. Lorsqu’a paru le Fils unique, son nom est devenu admirable en tous lieux avec le Christ. « Du lever du soleil à son couchant », est-il écrit, « mon nom a été glorifié parmi les nations. » (Mal. 1,11) Et ailleurs : « En tous lieux on offre à mon nom de l’encens et un sacrifice pur. Mais vous, vous le profanez. » Un autre dit : « Toute la terre a été remplie de la connaissance du Seigneur. » (Is. 11,9) Et encore : « Ils viendront disant : Nos pères ont eu de fausses idoles. » (Jer. 16,19)
2. Voyez-vous que tout cela est dit au sujet du Fils ? Car c’est son nom, à lui, qui est devenu admirable sur toute la terre, « Parce que votre magnificence a été élevée au-dessus des cieux. » Un autre dit : « Vous qui avez placé votre louange au-dessus des cieux. » Il a parlé de la terre : il passe maintenant au ciel, fidèle à sa coutume, de montrer que tout l’univers bénit son Maître. C’est ainsi qu’en – cet endroit il représente Dieu comme admirable là-haut, admirable ici-bas. En effet, ce ne sont pas seulement les hommes, ce sont les anges encore qui célèbrent les choses accomplies, et rendent grâces pour les bienfaits octroyés aux hommes : ce qu’ils ont fait tout d’abord, quand ils se formaient en chœur sur la terre. Il veut donc ou faire entendre cela même que les anges aussi chantent le Seigneur, ou représenter la grandeur de Dieu. En effet, quand l’Écriture veut exprimer la grandeur, elle rapproche ces deux éléments : par exemple, quand elle dit : « Comme le ciel est élevé par rapport à la terre. » Et encore : « Autant que le levant est éloigné du couchant, il a écarté de nous nos iniquités. » (Ps. 102,11,12) Ici donc il admire ce qui s’est passé ; tant de grandeur, de sublimité l’étonne : ce qu’il y avait de plus humble devient ce qu’il y a de plus élevé. « Vous avez formé dans la bouche des enfants et de