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qui n’aura pas de fin. D’où nous voyons qu’on, ne se sauve point en s’abstenant du vice ; à moins d’être en outre riche de vertus et de faire le bien.
9. Voilà pourquoi le Prophète, quand il nous a retirés du vice au moyen de la componction, qu’ils nous a rendus plus aptes à la pratique de la vertu, qu’il a vaincu la dureté de notre âme, qu’il l’a amollie par le même moyen, voilà pourquoi, dis-je, il se met a parler de la justice, en ces termes : « Offrez un sacrifice de justice, et espérez dans le Seigneur. » Qu’est-ce à dire : Offrez un sacrifice de justice ? Cherchez la justice, montrez de la justice : le plus beau présent que vous puissiez faire à Dieu, le sacrifice agréable, l’offrande propre à fléchir la colère, ce n’est point un sacrifice de veaux ou de brebis, c’est une conduite conforme à l’équité. Vous voyez ici comme une esquisse tracée de main divine de la législation future de l’Église ; et les choses spirituelles recherchées dès lors à la place des choses charnelles. Ici d’ailleurs, comme je l’ai dit plus haut, il entend par justice, non pas une vertu particulière, mais, la vertu en général : c’est ainsi que nous appelons juste l’homme qui réunit en soi toutes les vertus. Ce sacrifice-là n’exige ni argent, ni couteau, ni autel, ni feu : il ne se résout pas en fumée, en graisse et en cendre, il consiste tout entier dans l’intention de celui qui l’offre. Ni la pauvreté n’y est un obstacle, ni la misère une entrave, pas plus que le lieu ou quoi que ce soit : en quelque lieu que vous vous trouviez, vous pouvez l’offrir et être vous-même le prêtre, l’autel, le couteau et la victime. Telle est la nature des choses invisibles et spirituelles : elles offrent bien plus de facilités, parce qu’elles ne nécessitent aucune pratique extérieure. « Et espérez dans le Seigneur. » Un autre dit : « Et confiez-vous au Seigneur. » En effet, celui qui a mérité la faveur divine par une conduite équitable, celui-là y trouve un grand appui, un tout-puissant secours, une force irrésistible. Voyez-vous le fruit du sacrifice, qui vous attend à la porte ? Voyez-vous ce trésor de biens qui sur-le-champ s’entasse entre vos mains ? Qui pourrait encore inspirer de la crainte à celui qui a Dieu pour allié ? Mais ceci même n’est point une petite vertu, d’avoir confiance en lui, de se reposer sur lui. Avec la justice il nous demande donc cette autre vertu, la confiance, l’espoir en Dieu, la défiance et le détachement à l’égard des biens charnels, de telle sorte que nous fixions là-haut notre pensée. Car les choses de la vie présente ressemblent à des songes, à des ombres, et ont encore moins de consistance, ne faisant que paraître et s’envolant ; après, avoir dans l’instant de leur présence, porté le trouble dans nos cœurs : au contraire, l’espoir en Dieu est immortel, invariable, constant, exempt de changement ; il nous met dans une sécurité parfaite, il rend invincible celui qui s’y livre sans réserve et avec là ferveur convenable. « Beaucoup disent : Qui nous fera voir les biens ? La lumière de votre visage est empreinte sur nous, Seigneur. (Id. 7) » Après avoir parfait son exhortation morale, nous avoir, acheminés à la connaissance de Dieu, avoir mis en œuvre tous les moyens capables de redresser la raison de ceux qui sont égarés, en se servant surtout de l’exemple des fidèles et de la sollicitude divine à leur égard, il donne place à une objection qu’il emprunte aux hommes faibles et grossiers : « Beaucoup disent : Qui nous fera voir les biens ? » Ce n’est point le petit nombre, ce ne sont point les vrais sages, les fidèles éprouvés qui s’expriment ainsi : c’est la multitude, c’est cette foule confuse que sa démence ne quitte point. Quel est le sens de cette parole : « Qui nous fera voir les biens ? » Il y a des gens qui disent, les uns pour calomnier la Providence divine, les autres parce qu’ils sont épris de la volupté, de la mollesse, de l’argent, de la gloire, de la puissance : Où sont les biens de Dieu ? Me voici dans la misère, la maladie, l’infortune, en butte à des maux extrêmes, à la persécution, à la calomnie : tel autre, au contraire, vit dans la prospérité, les plaisirs, la puissance, la gloire, la richesse. Ces hommes ne recherchent que ces biens-là et négligent les biens véritables, je veux dire la sagesse et la vertu. Les autres, comme je le dis plus haut, partent de là pour accuser la Providence : Où est, disent-ils, la providence de Dieu, quand le monde offre le spectacle d’une telle confusion, quand la plupart des hommes vivent dans la misère, la pauvreté et l’excès des maux ? Quelle est la preuve de sa sollicitude ? On croit entendre des gens qui en plein midi, par un beau ciel, demandent à voir le soleil, et contestent l’existence de la lumière. C’est à quoi songe le Prophète, quand il dit de manière à résoudre d’un mot tous ces doutes : La Lumière de votre visage est empreinte sur nous, Seigneur :